Eidel Chana Geiger, dite Anne-Marie Lambert
Légende :
Carte d'identité dite des étrangers délivrée à Eidel Chana Geiger en novembre 1937 par le préfet de la Moselle et renouvelée à La Rochelle pour la période du 21 juin 1940 au 21 juin 1943.
Genre : Image
Type : Document officiel
Source : © Archives d'Etat de Genève Droits réservés
Date document : 1937 - 1940
Contexte historique
Eidel Chana Geiger, connue en résistance sous l’identité d’Anne-Marie Lambert, est née le 10 mai 1920 en Pologne. En 1934, la famille s’établit à Metz où Eidel reprend sa scolarité. De 1939 à 1941, elle est à La Rochelle où elle passe son baccalauréat.
En 1941, elle rejoint l’Armée Juive (future Organisation juive de combat) où elle est chargée, dès 1942, de recruter des membres. Après un court séjour à Nice où elle est à l'origine de la création du groupe local de l'AJ, elle s’installe définitivement à Lyon en 1942 avec son compagnon Ernest Lambert. Doctorante en Lettres, elle y tient un dépôt de presse au 149 Grande Rue de la Guillotière. Son commerce s’impose comme l’un des centres névralgiques de l’organisation. Jacques Lazarus en témoigne : « De la boutique on passait dans le sanctuaire : la chambre. Elle servait, à la fois, de salle à manger, de chambre à coucher, de salon, de salle de réception. Que de conversations anodines, ou sérieuses, rieuses ou tragiques, que de pourparlers importants se sont déroulés entre ces murs recouverts d’un papier bleu pâle (…). La commode était la pièce maîtresse. Je vois encore Ernest en ouvrir successivement les tiroirs. Le premier contenait les numéros de la presse clandestine, notre journal Quand-Même (…) ; le second cachait sous du linge des centaines de cartes d’identité et de multiples cachets ; dans le troisième quelques revolvers. » (Juifs au Combat, témoignage sur l’activité d’un mouvement de résistance, par Jacques Lazarus).
Anne-Marie participe à la réalisation de faux papiers mais également à des opérations de plus grande envergure, comme l’exfiltration en Suisse d’un groupe d’enfants juifs menacés d’arrestation. Au mois d’octobre 1943, arrêtée par la Gestapo à Nice, elle parvient à s’évader après plusieurs heures d’interrogatoire. Elle se rend alors à Toulouse où la direction nationale de l’Armée juive la charge de missions de transport de courrier et de liaison avec l’Espagne et la Suisse. Elle effectue aussi plusieurs missions de liaison et de transport d’armes pour la Résistance à Annemasse.
Le 18 avril 1944, elle est arrêtée par la douane de Landecy pour passage clandestin de la frontière alors qu’elle emmène deux jeunes filles en Suisse. Elle déclare aux douaniers être poursuivie par les Allemands parce qu’elle est de race juive et affirme avoir de nombreuses connaissances en Suisse dont son oncle Marc Jarblum (réfugié en Suisse en mars 1943, il travaille avec le JOINT et le Congrès juif mondial pour soutenir financièrement les activités de l’Armée juive en France). Interné au camp des réfugiés des Charmilles à Genève, Anne-Marie demande aux autorités suisses son renvoi en France afin d’y poursuivre ses études. Suite à cette demande, elle est renvoyée en France le 28 avril 1944.
Début juin 1944, elle épouse Ernest Lambert. Le 29 juin 1944, Anne-Marie et son époux Ernest, accompagnés de Maurice Hausner, sont contrôlés à la gare de Lyon-Perrache. Trouvé en possession de papiers compromettants, Ernest est arrêté, incarcéré à Montluc, puis exécuté le 8 juillet à Portes-les-Valence. Alors qu’elle est enceinte, Anne-Marie reprend ses activités clandestines avant de se rendre en Suisse pour y accoucher.
En juillet 1945, elle émigre en Palestine avec sa fille, Selma, née le 24 janvier 1945. La médaille de la Résistance avec rosette lui est décernée par décret du 24 avril 1946.
Auteurs : Fabrice Bourrée, Alexandre Bande
Sources et bibliographie :
CHA-Archives d'Etat, Genève, dossier Justice et Police Ef/2-7023
Service historique de la Défense, DAVCC, Caen : AC 21P 584 777 (Dossier Ernest Lambert)
Ordre de la Libération, commission nationale de la médaille de la Résistance française
Mémorial de la Shoah, Paris : CMXX-2 fonds Lublin
Ruth Fivaz-Silbermann, La fuite en Suisse: Les Juifs à la frontière franco-suisse durant les années de la "Solution finale", Paris, Calmann-Levy, 2020.
Organisation juive de combat – France – 1940-1945, Paris, éditions Autrement, 2008.
Juifs au Combat, témoignage sur l’activité d’un mouvement de résistance, par Jacques Lazarus (Capitaine Jacquel) chef du groupe parisien de l’Organisation Juive de Combat, Centre de Documentation Juive Contemporaine, Série « Etudes et monographies » n°9, Paris, éditions du Centre, 1947.
Site web du Mémorial de la Shoah.