Joseph Bass dit André
Légende :
Joseph Bass (à gauche) et Grigory Ritva dit Gregor, Soviétique engagé de force dans l'armée allemande, soldat de la légion Tartare au Puy-en-Velay, passé au maquis en avril 1944 et devenu commandant du 352e bataillon soviétique des FTP de Haute-Loire.
Genre : Image
Type : Photographie
Source : © Service historique de la Défense, Vincennes, GR 16P 36695 Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique en noir et blanc
Lieu : France
Contexte historique
Joseph Georges André Bass est né le 22 mai 1908 à Grodno (ou Hordna) dans l’actuelle Biélorussie dans une famille de confession juive. Il émigre en France en 1925 où il fait ses études et décroche son diplôme d’ingénieur. Il exerce ensuite comme conseiller juridique auprès de propriétaires industriels. Il s’engage au mouvement socialiste libertaire en 1935-1936, rédige des chroniques de politique étrangère puis est mobilisé à la déclaration de guerre.
Démobilisé, il choisit de ne pas se déclarer comme juif avec le premier statut du 3 octobre 1940. Il trouve un emploi à Lyon, fait quelques allers-et-retours à Vichy au service de la Production industrielle dont il dépend. Il gagne ensuite Marseille où il entre en contact avec les premières filières d’évasion, notamment la filière de Varian Fry. Il rencontre Boris Vildé dans la cité phocéenne en novembre 1940. Il fait également la connaissance du rabbin Zalman Schneerson. Celui-ci dirige l’Association des israélites pratiquants qui s’occupe alors de jeunes juifs dont Bass devient le professeur de dessin industriel.
Joseph Bass commence alors à venir en aide aux réfugiés politiques mais uniquement par relations personnelles du fait de son manque de moyens financiers. Le 3 juillet 1941, il est arrêté par la police lyonnaise comme "agent soviétique très dangereux" et, après un emprisonnement au fort militaire du Paillet près de Lyon, il est interné au camp d’Argelès-sur-Mer. Il s’en évade le 21 juillet 1941 et revient à Marseille.
L’invasion de la zone Sud en novembre 1942 entraîne l’occupation de Marseille par l’armée allemande menaçant directement la sécurité des juifs déjà victimes des persécutions antisémites de Vichy. Joseph Bass fonde le Groupe d’action contre la déportation plus connu sous l’appellation "Service André" pour soustraire les juifs aux rafles et à la déportation tout en entraînant les jeunes et les hommes valides dans la voie de la lutte armée. Le groupe est affilié aux Mouvements Unis de Résistance (MUR). Les débuts sont artisanaux et il finance l‘activité sur ses propres fonds, ce qui le plonge dans une grande précarité. Par l’intermédiaire de Léon Poliakov, il rencontre Maurice Brener du Joint, ce qui lui permet de développer son activité grâce au financement apporté par cette organisation.
À la fin de l’année 1942, deux pasteurs protestants, Leenhardt et Lemaire, l’informent de l’existence d’un refuge possible, dans la région du Chambon-sur-Lignon en Haute-Loire. Il reçoit l’aide de plusieurs personnalités, plus tard reconnues comme Justes parmi les Nations, qui l’aident à organiser l’évacuation et la protection des juifs sur ce plateau de refuge : André Trocmé, son neveu Daniel Trocmé plus tard arrêté et assassiné au centre de mise à mort de Maïdanek ou Hermine Orsi.
Durant l’hiver 1943-1944, il créé le maquis juif du Chambon-sur-Lignon sur le plateau du Vivarais-Lignon. Il participe à la mise en place d’un entraînement spécifique en vue de la préparation des combats après le débarquement attendu. Des groupes de combat juifs sont constitués, un pour les jeunes et trois pour les adultes comprenant une dizaine de membres chacun.
Depuis août 1943 et un séjour à Nice, Joseph Bass est également en relation avec la MOI et avec les FTP dont l’activité militaire est plus proche de ses aspirations. Il devient membre du comité régional des FTP de Haute-Loire et est plus particulièrement chargé du Travail Allemand. Profitant de sa bonne connaissance de l’allemand, du russe et du tatare, il écrit des tracts à destination des soldats, dont une partie sont des Russes incorporés de force. Une unité constituée essentiellement de déserteurs est mise en place et devient le 352e bataillon FTP. Bass devient membre du triangle de direction de cette formation.
Arrêté le 8 mars 1944 par la police allemande à Marseille alors qu’il devait prendre un dernier convoi de réfugiés, Joseph Bass s’évade et regagne la Haute-Loire.
En juin 1944, lors d’un voyage à Lyon, il rencontre Lucien Lublin, un des responsables de l’Armée juive. Le maquis du Chambon-sur-Lignon devient alors un centre d’entraînement militaire pour les nouvelles recrues de l’AJ. L’AJ met également un instructeur à la disposition du maquis, Léon Abraham. Au début du mois d’août, ces jeunes sont repartis vers Lyon.
Durant l’été 1944, Bass prend part à la libération du Puy-en-Vellay le 19 août à la tête de ses groupes juifs de combat puis participe à la reddition d’une importante colonne allemande à Estivareilles. Entre le 27 et le 31 août, à Chamonte-Chomerac (Ardèche), il réussit à la tête d’un petit détachement à capturer de nombreux Allemands et à récupérer un important butin de guerre.
Après la Libération, il occupe diverses fonctions à la subdivision militaire de la Haute-Loire jusqu’en novembre 1944 puis en Allemagne pour la DGER. Il est démobilisé le 31 mars 1946 à Berlin. Il reçoit la légion d’honneur à titre militaire, la croix de guerre avec palmes et la médaille de la Résistance française (décret du 11 mars 1947).
Auteurs : Guillaume Pollack, Fabrice Bourrée
Sources et bibliographie :
Archives nationales, 72AJ 71, dossier 11 (témoignage de M. Bass, juin 1947).
Service historique de la Défense, Vincennes : GR 16 P 36 695.
Ordre de la Libération, archives de la commission nationale de la médaille de la Résistance française.
Mémorial de la Shoah, Paris : DLXXXI-23 et 35.
Organisation juive de combat – France – 1940-1945, éditions Autrement.
Jacques Ravine, La Résistance organisée des juifs en France 1940-1944, Julliard, 1973.