Insigne de l’Organisation de Résistance de l'armée (ORA)

Légende :

Un insigne symbolise une organisation et est un signe de reconnaissance pour les membres qui le portent.

Genre : Image

Type : Photo

Source : © © Collection Maurice Bleicher Droits réservés

Détails techniques :

Ecusson métallique de 30 x 34 mm.

Date document : 1946

Lieu : France

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Analyse média

L’insigne de poitrine de l'Organisation de Résistance de l'armée (ORA), arboré après la Libération par les anciens, a été fabriqué par le joaillier Chaumet à Paris. Il mesure 30 x 34 mm et porte un numéro d'attribution au revers. Un modèle de boutonnière mesure 19 x 21mm. Un pin’s 16 x 18 mm a été fabriqué récemment.
La date de la fabrication de ces insignes n'est pas connue.
L'écusson représente deux glaives croisés, une croix de Lorraine ainsi que les lettres ORA sur un carré bordé de tricolore.


Auteurs : Pierre Balliot

Contexte historique

Dès la signature de la convention d’armistice le 25 juin 1940, des officiers comprennent que l’armistice n’est pas la paix et que, par conséquent, il convient de préparer l’encadrement et l’armement de futures unités de combat et, plus encore, d’entretenir la flamme de la revanche qu’il ne fallait à aucun prix laisser s’éteindre.

Ministre de la Défense nationale, le général Weygand catalyse alors toutes les forces de résistance à l'ennemi. Sans mettre en cause l'autorité politique du maréchal Pétain, l'armée, dans son ensemble, compte sur Weygand pour prendre le commandement l'heure venue. Deux possibilités s'offrent à lui pour atténuer les conséquences militaires de la convention d'armistice : l'une, légale, ressort de la politique et de la diplomatie ; l'autre, en opposition avec les accords signés, débouche sur l'action collective. L'équipe du général Weygand reste en place jusqu'au 5 septembre (remaniement où Weygand perd son portefeuille). En deux mois seulement, elle a le mérite d'orienter l'activité clandestine dans les deux grandes directions qui vont perdurer jusqu'en novembre 1942 : le recensement des personnels et le camouflage des matériels en vue d'une mobilisation secrète. Les premières dispositions prises dans les jours qui suivent l'armistice sont des mesures conservatoires. Les trois secrétaires d'État aux Armées (Guerre : général Colson, Air : général Pujo, Marine : amiral Darlan) envoient en AFN (Afrique française du Nord) ce qu'ils peuvent comme matériels, armes et munitions. 


Lors d'une conférence donnée en 1946, à l'École de Guerre, le général Revers rappelle qu'en fait il n'existait pas de plan concerté par le commandement, mais que les réactions militaires sont nées "du fait de quelques officiers, de quelques chefs qui simplement en s'entendant entre eux ont pris un certain nombre de mesures destinées à faciliter le retour du pays dans la lutte."

Après la démobilisation de l'armée d'armistice, les officiers ou sous-officiers désireux de tenir un rôle actif dans la résistance contre l'Allemand vont, les uns s'intégrer individuellement dans les mouvements ou les réseaux, les autres se regrouper dans l'Organisation métropolitaine de l'armée (OMA). L'appellation Organisation de Résistance de l'armée (ORA) la remplace officiellement au printemps 1944, mais ne sera que rarement utilisée avant la Libération.

Désigné par le général Giraud, le 3 novembre 1942, comme chef de l'armée clandestine, le général Frère est un terrien qui a le sens du réel et des possibilités, c'est un combattant, douze ans de Maroc et les deux guerres, et un meneur d'hommes, et, bien qu'arrivé au sommet de la hiérarchie, il a su rester un officier de troupe. Sa désignation répond aux deux conditions nécessaires : le prestige et la présence. Sous sa haute autorité, le général Verneau [qui lui succédera à la tête de l'ORA au lendemain de son arrestation] procède à la transformation de la mobilisation clandestine en Armée secrète, prend contact avec les mouvements de résistance en vue de la livraison, de certains matériels et d'assurer la liaison avec les organes liquidateurs des différents commandements en zone Sud.

La nouvelle organisation reste centrée sur l'ancienne région militaire, l'ossature en est assurée par des délégués régionaux (le colonel Zeller pour la zone Sud et, à Lyon, en région R1, le commandant Descour) et départementaux, ses chefs comme au temps de l'armée de l'armistice sont plus souvent des capitaines et des commandants que des colonels. Ces officiers ont pour mission de créer autour de chaque garnison de zone Sud un noyau de cadres destinés à la mobilisation des maquis, à la direction des opérations de guérilla et des sabotages au débarquement.

En Drôme, le lieutenant Pierre Arnaud ("Denis") appartient à cette cohorte. Michel Planas brosse son portrait : "Très grièvement blessé aux jambes sur la Somme en 1940 (amputé d'une jambe), il était en convalescence dans la Drôme d'où est originaire sa femme. Sa remarquable intelligence complétée par la solide expérience acquise du Deuxième bureau, notamment à Shanghai, lui faisait utiliser ses ennuis de santé pour mettre au point une structure et la collecte de renseignements qui allait servir à la Résistance armée de la Drôme. Sa profonde connaissance de l'allemand lui avait permis de repérer les éléments non allemands des services basés à Valence et de nouer des contacts avec des informateurs antinazis autrichiens, alsaciens et hongrois." Dans l'armée d'armistice, le lieutenant puis capitaine Arnaud sert à l'état-major de la subdivision de Valence. Fin 1942, le lieutenant Arnaud, en contact étroit avec le commandant Descour, organise l'ORA de la subdivision de Valence avec comme auxiliaires l'adjudant Pagon qui restera jusqu'au bout, le capitaine Fabre qui disparaîtra volontairement ainsi que le lieutenant Glandard lorsque le danger se fera sérieux. En poste auprès de la préfecture de Valence, il va déployer une très grande activité clandestine. Il est "l'oreille amie" dans la fourmilière vichyste. Grâce à ses informations, de nombreux résistants, sédentaires et maquisards drômois, lui doivent d'avoir échappé aux rafles et aux ratissages de la police, de la Milice ou des GMR (Groupes mobiles de réserve). De plus, il a la mainmise sur la société des transports Éclair à Valence-sur-Rhône, dirigée par Chambrier, ancien adjudant-chef de l'armée d'armistice.

Très tôt, il cherche à établir des contacts avec les responsables des mouvements de jeunesse comme les Compagnons de France que les représentants de la communauté Boimondau (Boîtiers de montres du Dauphiné), connus à Valence-sur-Rhône en raison de leur comportement peu conformiste. À cet effet, au cours des premières semaines de l'année 1942, il rencontre Gustave Coureau, chef de pays (responsable départemental) des Compagnons de France à Valence-sur-Rhône. Ce premier contact s'établit à l'instigation de Guillaume de Tournemire, chef national du mouvement, compagnon et membre du réseau Alliance, ayant conseillé à Gustave Coureau de prendre contact, à titre strictement personnel, avec le lieutenant Arnaud : "On lui a parlé de vous, en raison de vos fonctions dans le mouvement et à la communauté Barbu (Boimondau)."

Nommé par Descour chef départemental ORA de la Drôme en décembre 1942, il est le premier organisateur des maquis. En contact avec Geyer en novembre 1942, il lui fait monter deux camions Renault et une Citroën 11 traction avant au Grand-Serre. À Crest, il rencontre Brentrup et lui demande de recruter des sizaines. À Valence, il est en relation avec le commandant Bénézech, qui va commander le 2e bataillon FFI (Forces françaises de l'intérieur) de la Drôme. Il ravitaille le maquis Barbu par camions et inspecte le premier maquis de la Lance en janvier 1943 avec Descour et Tena, puis le camp Thivollet-Bozambo. Challan-Belval dépend de lui, non seulement pour la transmission des messages, mais aussi pour le financement du maquis.

Le 22 septembre 1943, deux mois avant la prise de commandement de l'ORA par le général Devers et la fusion AS (Armée secrète)-ORA en région R1, le capitaine Arnaud est victime d'un grave accident d'auto, où sa femme trouve la mort, et il doit alors abandonner son commandement. À peine remis (avril 1944) il s'occupe alors du service de renseignement français et reste en contact constant avec les FFI. La veille de la libération de Valence, le 31 août 1944, il fait parvenir de nombreux renseignements sur les Allemands.

Chef régional ORA et chef d'état-major FFI, le commandant Descour exécute le regroupement du Vercors résultant du plan "Montagnard" accepté le 10 février 1943 par le général Delestraint, chef de l'AS, puis accepté par Londres. Les FTP (Francs-Tireurs et partisans) ne veulent pas y participer et ne veulent plus obéir à Alain. La situation dans le Sud-Drôme n'étant pas très brillante, de Lassus demande à Arnaud, le 3 août 1944, de conduire les négociations en vue de remplacer "Alain" par "Constant".

La qualité des chefs, la chaîne de liens personnels et le ton professionnel qui caractérisent l'ORA en font une porte de sortie logique pour les officiers activistes qui ne veulent ou ne peuvent pas s'échapper en Afrique du Nord. Inévitablement, la part prise par les officiers d'active dans les principaux mouvements de Résistance civils est bien amoindrie.

D'une façon assez générale, les groupements de l'ORA organisent la lutte contre la Gestapo et ses agents français, puis ils se penchent sur la préparation des terrains de parachutage avec ce qui en découle en particulier dans le camouflage des armes, enfin ils exécutent les sabotages intéressant les transports ou les usines, dont l'ennemi tire ses moyens. Mais à aucun moment l'ORA n'envisage les actions du type terrorisme urbain, contre des ennemis isolés, se refusant à prendre la responsabilité du cycle infernal action-représailles. Dans son rapport au CNR (Conseil national de la Résistance) du 27 février 1944, Revers mentionne la part prise à l'action immédiate, proportionnellement à ses moyens, dans le cadre des missions fixées par l'état-major des FFI, mais cela sans chercher à conditionner les populations à une action révolutionnaire, simplement pour prendre part matériellement à une phase préparatoire du Débarquement.

Bien que n'ayant, au COMAC (Comité d'action militaire), que l'action limitée d'un conseiller technique, le général Revers s'est fixé des buts, dont il ne s'écarte pas : opposition aux attentats individuels qui provoquent les représailles ; opposition aux luttes politiques, donc à la création des milices patriotiques ; opposition à toute forme défensive de la lutte, donc aux opérations organisées comme celles des Glières ou du Vercors : " C'est glorieux, dit-il, ce n'est pas payant ". Il ne voyait qu'une tactique possible : les groupes de Résistance dispersés mais suffisamment liés entre eux pour pouvoir être regroupés facilement en vue d'actions offensives violentes et très courtes.


Auteurs : Pierre Balliot
Sources : Dvd-rom La Résistance dans la Drôme-Vercors, éditions AERI-AERD, février 2007.