Le couple Nivon, Claire Brest et Elsa Triolet à Saint-Martin-d'Août

Légende :

Photographie prise lors d’une visite de François Lachenal à Louis Aragon dans la Drôme.

Genre : Image

Type : Photo

Source : © Collection Jean Sauvageon, don Michel Bret (fils de Claire Bret). Droits réservés

Détails techniques :

Photographie argentique noir et blanc.

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Saint-Martin-d’Août

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Analyse média

Photographie prise par François Lachenal à Saint-Martin-d'Août, petite commune située à une dizaine de km se Saint-Donat. Claire Bret, née Nivon, qui a prêté son appartement à Aragon et Elsa est allée habiter chez ses parents, son mari étant prisonnier.

Lors d'une visite de François Lachenal à Saint-Donat, en compagnie de son épouse, ils sont allés chez Nivon pour manger à midi. Étant agriculteurs, les Nivon pouvaient plus facilement faire un repas plus copieux que ce que pouvait faire Elsa (de plus pas très bonne cuisinière !).

Sur le cliché, on voit de gauche à droite : le couple Nivon, Claire Brest et Elsa Triolet.

Dans la famille Nivon, on situe cette journée aux alentours du 15 août 1944. C'est ce jour-là que Louis Aragon aurait révélé leur véritable identité.


Auteurs : Jean Sauvageon

Contexte historique

François Lachenal est né à Genève en 1918. Il est déjà impliqué dans les milieux de l’édition. À la fin des années 1930, il rencontre Pierre Seghers et Pierre Emmanuel. En 1940, il participe à la création de la revue Traits. Alors qu’il prépare une thèse à Bâle, il est nommé, le 21 novembre 1942, attaché à la légation suisse à Vichy qui représente aussi les intérêts de la Grande-Bretagne, des Etats-Unis et d’autres pays en guerre contre l’Allemagne, après l’occupation de la zone libre. Lachenal est envoyé au consulat suisse à Marseille au printemps 1943, puis à celui de Lyon à l’été 1944, enfin à Berlin en octobre.

De par son engagement envers une littérature de lutte contre le nazisme, François Lachenal, dès sa nomination à la légation suisse, à Vichy, reprend les contacts qu’il avait dans le monde littéraire en France, notamment avec son ami Jean Lescure.

Ses fonctions d’attaché à la légation suisse lui donnent une grande liberté de circulation. Ainsi, il se rend plusieurs fois à Villeneuve-lès-Avignon, à Dieulefit où il rencontre, entre autres Pierre Seghers et Pierre Emmanuel. Il va à Saint-Donat retrouver Louis Aragon et Elsa Triolet qui l’emmènent, pour partager un repas plus copieux que celui qu’ils auraient pu leur offrir, dans une ferme amie, chez Nivon à Saint-Martin-d’Août.

Ses passages multiples de la frontière franco-suisse lui donnent la possibilité de porter des manuscrits en Suisse ou de ramener des livres ou revues imprimées. Il permet l’impression de la revue Messages. Parmi les nombreuses maisons d’édition helvétiques, il dirige à Genève « Les Trois Collines ». La censure suisse existe aussi ; par exemple, elle exige la suppression de quelques mots dans Le Silence de la mer de Vercors. Devant ses exigences, François Lachenal crée avec un ami, une maison clandestine, « À la porte d’ivoire ». Ces éditeurs prennent le relais de l’édition française soumise à la censure. Il introduit en Suisse 10 exemplaires de L’Honneur des poètes et le fait réimprimer par La porte d’ivoire. Ils y éditent aussi Poèmes français.

Il ne peut pas toujours emporter les manuscrits et a recours, alors, à d’autres diplomates, comme le ministre de Hongrie à Vichy, S. E. Bakasch Besseniey, et le ministre de Roumanie, S. E Hiott. C’est le cas de Domaine français, imprimé en décembre 1943, véritable somme réunissant « tout ce que la France avait de plus illustre dans les différentes expressions de la littérature » de façon « a faire assumer collectivement à la littérature française l’honneur de l’insoumission ».

François Lachenal note encore, en 1995, dans son ouvrage Éditions des Trois Collines, Genève-Paris : « Cette période fut, pour la Suisse, entre autres devoirs, l’occasion de prendre le relais de l’édition française – voire d’être un refuge – et, pour moi, de tirer pleinement profit de mon poste à Vichy en jouant au "porteur de valises", comme l’on disait déjà ».

François Lachenal, écrivain lui-même, signe ses textes sous le pseudonyme de Joseph Armand. Après la guerre, il continue d’éditer des poètes français, en particulier Paul Éluard, ainsi que des collections comme Classiques de la liberté ou Les grands peintres par leurs amis.

Il décède à Genève en 1997.


Auteurs : Jean Sauvageon
Sources : Paxton Robert O., Corpet Olivier, Paulhan Claire, Archives de la vie littéraire sous l’occupation. À travers le désastre, Editions Tallandier/IMEC, page 231. SALAET, vidéo Louis Aragon et Elsa Triolet en Résistance. Dieulefit, Lyon, Saint-Donat. 2004. Wikipédia, François Lachenal. Jacques Barrelet, « Lachenal, François », Dictionnaire historique de la Suisse, 1998-2009, Berne.