Cinquantenaire des maquis des Baronnies

Légende :

Rassemblement à Buis-les-Baronnies à l’occasion du cinquantenaire des maquis, et prise de parole de Lucien Dufour, commandant du 1er bataillon FTPF Drôme en 1944.

Genre : Image

Type : Photo

Producteur : inconnu

Source : © AERD Droits réservés

Détails techniques :

Photographie argentique couleur.

Date document : août 1994

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Buis-les-Baronnies

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Analyse média

Pour le Cinquantenaire des maquis des Baronnies, en août 1994, Lucien Dufour parle devant le cinéma, à Buis-les-Baronnies.

Seul en costume, il est juché sur un banc de pierre ; tenant un papier, il s’adresse à l’assistance, l’exhortant de la main. À droite, on reconnaît Paul Veyrand (lieutenant « Pavel »), les bras croisés, Pierre Charransol - rédacteur de la brochure produite pour cet anniversaire, puis madame Lambert, une résistante habitant maintenant Tulette. Tout à fait derrière, Léandre Munoz – qui a participé au réseau de Résistance de Buis-les-Baronnies en tant que sédentaire. À gauche de l'orateur, Charles Jarnias, l'un des principaux organisateurs de cette importante commémoration.

Au cours de la cérémonie, le Collectif du Cinquantenaire appose une plaque en l’honneur du 1er Régiment Drôme FTPF, que l’on peut voir maintenant à gauche du cinéma (on peut se reporter à l’album à ce sujet).

La brochure élaborée à cette occasion s’intitule LES MAQUIS DES BARONNIES, Collectif du Cinquantenaire des Maquis de la Région des Baronnies 1944 – 1994. Elle est de format 21 X 29,7 cm, comprend 32 pages ; elle a été tirée à l’Imprimerie Bel, Valence, en juillet 1994.

Ainsi s’exprimait, 50 ans après les événements, par l’écrit, par la parole, par la présence publique, par la pose d’une plaque, la volonté de conserver la mémoire d’une lutte importante pour la liberté et le maintien de la république française, avec ses connotations locales et chronologiquement limitées (Juin-août 1944, précise la plaque) ; bien qu’un demi-siècle se soit écoulé, les participants à la rencontre peuvent apprécier toute l’actualité du programme du CNR (Conseil National de la Résistance).


Auteurs : Michel Seyve et Claude Seyve

Contexte historique

On ne connaît pas le contenu des discours, tel celui de Lucien Dufour devant le cinéma du Buis pour le Cinquantenaire des Maquis des Baronnies. Pour autant, on possède les principaux éléments d’histoire qui, ont conduit ce chef aux postes responsables auxquels il a été appelé de 1943 à 1945, et qui expliquent que ce soit lui qui intervienne prioritairement au cours de ce jour commémoratif.

La mobilisation qui suit le 6 juin 1944, dès que le débarquement est connu, a des effets immédiats et amples à la fois, à plusieurs niveaux, singulièrement dans les Baronnies, les Pays de l’Eygues et le Bas-Diois.

D'abord, les maquis commencent à s'organiser en compagnies FFI, tandis que leur effectif augmente. Un groupe d’évadés de la forteresse de Sisteron – dont Fernand Tressos, futur adjudant Meyraud, au maquis Morvan – rejoint les FTP drômois.

Les FTPF par exemple « se constituent en unités régulières ». « La compagnie Vaillant-Couturier va regrouper six maquis et les groupes de sédentaires armés de Vilhet à Nyons, « Gaby » [Reynier] à Buis-les-Baronnies, Monier à Valréas ». Ces unités deviennent, en juillet-août, « l'ossature des bataillons » formés alors, tel celui du Buis, commandé par Lucien Dufour, celui de Nyons commandé par « Marc », celui de Montjoux commandé par « Morvan ». Un autre est organisé autour de Die. « La 1ère compagnie FTP de « Paris » [Lucien Dufour] a un effectif qui dépasse les 80 hommes. « Paris » installe son PC [au Buis] ».

Quatre bataillons FTP et deux AS deviennent ainsi opérationnels. Avec la forte présence des FTP. Il faut noter l’influence communiste tout à la fois locale et d’origine méridionale, précisément du Vaucluse et de Marseille, en particulier dans la personnalité d’André Chaiffre qui devient assez rapidement l’adjoint du capitaine de Lassus Saint-Geniès, chef d’état-major de la Drôme.

Les points stratégiques et les cités sont occupés par la Résistance dès le début juin. Les Allemands s’en tiennent pourtant à une stratégie d’occupation stricte : Valréas, Nyons, Séderon… en connaissent le prix sanglant. Cependant, Buis-les-Baronnies, libérée le 7 juin, le demeure jusqu’à la fin de la guerre.

À la fin juin, la détermination des compagnies résistantes s’affirme dans des actions farouches et raisonnées. Paul Veyrand, capitaine Pavel, décrit certaines d’entre elles. Parmi celles qui sont répertoriées, les « combats de Montclus », du 19 au 22 juin sont un succès. Bien que ces journées soient marquées par des combattants blessés, par le village de Montclus (Hautes-Alpes) brûlé, du côté français, les Allemands relevant des tués (dont on ignore le nombre), le bilan est significatif au plan militaire. Outre le fait que deux canons antichars ont été pris à l’adversaire – symbole précieux s’il en est – les forces de la Résistance se révèlent capables d’interdire l’axe routier alpin que constituent les D 94 et D 944.

Des actions, parfois éloignées des bases de départ, visent les lignes électriques et téléphoniques, les voies de communication : elles gênent quotidiennement l’occupant, portant en outre un coup à son moral. Il n’est pas trop de dire que les FTP tiennent pratiquement la partie orientale de la Drôme du Sud (Les Baronnies, Le Nyonsais, Les Pays de l’Eygues, …), le lieu de la cérémonie observée étant l’un des centres de cet espace.

Fait important pour les pays du Sud-Drôme, le 10 juillet 1944 est mis en place l’hôpital de la Résistance à Buis-les-Baronnies, sous la responsabilité de Lucien Dufour et du Docteur Achiary. Cette unité est appréciée lors de la bataille dite de Montélimar.

Le 2 août, le 1e Régiment FTP Drôme Sud est constitué avec les quatre bataillons existants, tandis que le 13 août, l’AS forme un 4e bataillon.

Au cours de l’été, les ripostes allemandes ont toutefois été meurtrières et souvent impressionnantes, pour les maquisards comme pour la population, témoignant d’un durcissement de la guerre. De la reconquête de Valréas-Taulignan, le 12 juin (81 morts du côté de la Résistance) au bombardement de Séderon le 10 août (6 morts essentiellement civils), les ripostes allemandes laissent des traces douloureuses dans les mémoires aujourd’hui encore.

Après le débarquement allié, le 15 août, la décision d’Hitler, le 18, de se retirer du Sud de la France, les FFI s’engagent dans la dure étape de la libération du département. Les jeunes résistants, plus aguerris, sont confrontés à des forces allemandes puissantes, mues par une volonté déterminée de repli par la vallée du Rhône, en même temps qu’à la coopération avec les forces de la 7th U.S.Arrmy.

La 8e compagnie (formée des maquis AS) de Pierre Rigaud, Georges, entre en contact le 23 août avec les Alliés, à qui elle sert d’infanterie d’accompagnement.

Le 22 août, près de Nyons, commence le combat dit de Bois Saint-Pierre au cours duquel l’un des canons pris aux Allemands, en juin, à Montclus, est utilisé contre des blindés adverses. Ces accrochages protègent Nyons mais coûtent une dizaine de victimes aux FFI. L’essentiel des forces de la Résistance s’est déplacé des montagnes de l’Est vers la vallée du Rhône. Le 22 août encore, un détachement du maquis Morvan, probablement attaqué par des éléments de la 11e Panzer-Division, perd six hommes près de Grignan, alors que le lendemain, les États-Uniens font leur première incursion à Nyons.

Au moment où les combats font rage dans la vallée du Rhône (Pierrelatte libérée le 27, Montélimar le 28), Lucien Dufour alors capitaine Paris, prévoit à Dieulefit, l’hébergement de Louis Aragon et d’Elsa Triolet, occupés avec Jean Bonfils et Pierre Lenoir, à diffuser La Drôme en Armes.

Jusqu’à la libération complète de la Drôme, le 31 août 1944, les compagnies issues des groupes sédentaires drômois du sud et des maquis des montagnes,se font apprécier dans leurs activités d’accompagnement des troupes allées, au cours de multiples combats, village par village, colline par colline. Ainsi, le bataillon Morvan participe au nettoyage du terrain au sud du Roubion à partir du 26 août.

Le 1er septembre, les compagnies, victorieuses, défilent aux côtés des Alliés américains à Montélimar. Sans doute la guerre est loin d’être finie… « Juin-août 1944 », est-il inscrit sur la plaque proche du cinéma devant lequel parle, 50 ans plus tard, Lucien Dufour, tenant à conserver la mémoire du lieu, de la date et de la durée du « PC » du « 1er bataillon » du « 1er Régiment Drôme FTPF ».


Auteurs : Michel Seyve et Claude Seyve
Sources : Dvd-rom La Résistance dans la Drôme et le Vercors, éditions AERI-AERD, 2007. Mémoires de l’ombre, Lucien Dufour, éd Scriba, 1989. Pour l’amour de la France Drôme-Vercors 1940-1944, éd. Peuple Libre, 1989. Informations de Charles Jarnias (Buis-les-Baronnies). LES MAQUIS DES BARONNIES, Collectif du Cinquantenaire des Maquis de la Région des Baronnies 1944 – 1994, format 21 x 29,7 cm, 32 pages, Imprimerie Bel, Valence, juillet 1994.