Boris Frenkel
Légende :
Membre des Eclaireurs israélites de France, Boris Frenkel rejoint la Résistance au sein de la 35e Brigade FTP-MOI début 1943. Arrêté le 25 août 1943, incarcéré à la maison centrale d'Eysses, il est déporté à Dachau le 18 juin 1944. Il meurt à Gusen le 21 mars 1945.
Genre : Image
Type : Photographie
Source : © Pôle Mémoire et Archives - Ville d'Agen Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique en noir et blanc
Date document : sans date
Lieu : France - Occitanie (Midi-Pyrénées) - Haute-Garonne - Toulouse
Contexte historique
Boris Frenkel naît à Paris le 22 février 1922, de Samuel Frenkel et de Anna Rivkind ; il a un frère et une sœur. Il s’agit d’une famille bourgeoise, juive mais peu pratiquante, qui prend le chemin de l'exode en mai-juin 1940 et parvient à Auch (Gers), où elle occupe un très bel appartement. Boris Frenkel a dit plus tard devant les policiers de la 8e Brigade de Police de Sûreté de Toulouse, qu’il a très mal réagi face à la Débâcle : "La France est tombée bien bas". A la rentrée 1940, au lycée d’Auch, il est inscrit en section de mathématiques ; puis, il passe en philosophie. Il côtoie des élèves réfugiés eux aussi, juifs pour certains d’entre eux, et adhère aux Éclaireurs de France. Il est reçu à la deuxième partie du baccalauréat en juillet 1941.
Il s’installe à Toulouse à l’automne 1942. Avide d’apprendre, il travaille à la bibliothèque municipale, les sciences mais aussi l’histoire ; néanmoins, au regard de la loi sur le Service du Travail Obligatoire (STO), il se trouve en situation irrégulière. Par précaution, il préfère changer d’adresse et loge, début 1943, chez une famille dont le fils est étudiant en médecine. C’est à ce moment-là, qu’il devient réfractaire au STO et résistant. Le milieu estudiantin favorise les rencontres avec des jeunes qui n’acceptent ni la défaite de la France, ni la présence de l’occupant allemand à Toulouse depuis le 11 novembre 1942. Il adhère d’abord aux Jeunesses Communistes clandestines, grâce à un contact dont le pseudo est « Paul », puis rejoint la 35e Brigade de Francs-Tireurs et Partisans – Main d’œuvre Immigrée (FTP-MOI) ; il a expliqué lors d’un interrogatoire que, pour lui, les FTP-MOI sont « une organisation d’action plus directe que celle des Jeunesses Communistes ».
Comme membre des FTP-MOI, son numéro matricule est le 35005 ; il dispose d’une fausse carte d’identité établie au nom de Georges Dumas et est affecté à un groupe de trois combattants. En mai 1943, il participe à une attaque à la bombe contre un transformateur de la Cartoucherie de Toulouse. Le même mois, son groupe détruit une machine sur un chantier allemand de réparation de citernes d’essence. Le 17 juillet, il dépose une bombe, place des Carmes, devant la maison du docteur Jean Barthet, président de la section toulousaine du Parti Populaire Français (PPF), parti d’extrême droite favorable à la politique de collaboration avec les nazis.
Le 23 juillet 1943, Marcel Langer, premier commandant militaire de la 35e Brigade FTP-MOI, est guillotiné dans la prison Saint-Michel. Il avait été condamné à mort par la section spéciale de la Cour d’appel de Toulouse pour détention d’explosifs. Le soir même, Boris Frenkel se porte volontaire pour le venger en exécutant un soldat allemand. Le préfet régional Cheneaux de Leyris informe par voie de presse que « une prime très importante, en argent sera versée par les autorités françaises à la ou les personnes permettant d’identifier ou de retrouver le ou les auteurs de l’attentat commis par arme à feu au cours de la nuit du 23 au 24 juillet 1943 contre un militaire allemand rue Bayard à Toulouse ».
Le 23 août, Boris Frenkel est désigné par Victor Bardach (dit Jan Gerhard, ancien officier polonais qui avait combattu en 1940 en France dans un régiment polonais, successeur de Marcel Langer comme commandant militaire de la 35e Brigade FTP-MOI), pour exécuter Louis Mas, responsable du service de renseignement de la Milice, plus particulièrement chargé de la lutte contre les communistes et les Juifs. Le 25 août, il se présente au domicile de Louis Mas, 32 rue Pharaon, monte au 1er étage, parvient à se faire ouvrir la porte. Il tire par deux fois. Dans la rue, un policier le poursuit. Un passant le fait chuter, il est arrêté et finalement conduit au commissariat central, dans les services de la 8e Brigade de Police de Sûreté. Lors des premiers interrogatoires, il refuse de répondre à certaines questions, il ne donne aucun nom, malgré les violences physiques. Il ne révèle pas l’adresse de son logement mais les policiers finissent par le localiser.
Présenté au juge d’instruction le 7 septembre 1943, il finit par reconnaitre son appartenance aux FTP-MOI et justifie son action contre le milicien Mas. Il affirme l’avoir exécuté par patriotisme, pour hâter la libération de la France, que la Milice retarde par l’aide active qu’elle apporte à l’envahisseur. Incarcéré à la prison Saint-Michel, il parvient à maintenir le dialogue avec ses camarades, par l’intermédiaire de l’aumônier israélite. Il organise, avec un autre résistant Grégoire Filatow et cinq autres détenus, une tentative d’évasion qui échoue. Craignant que l’autorité allemande ne s’empare de Boris Frenkel, le procureur général insiste pour qu’il soit jugé au plus tôt. La Cour spéciale, réunie à huis clos le 25 février 1944, le condamne à 20 ans de prison. Le 26 février 1944, il est transféré à la Centrale d’Eysses, à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne) où, depuis octobre 1943, les autorités de Vichy rassemblent les détenus politiques de la zone Sud. Mais le 19 février 1944, les détenus se sont révoltés afin de rejoindre les maquis. L’opération a échoué. Le 23 février, douze détenus ont été condamnés à mort (dix Français et 2 Espagnols) et fusillés. Le 30 mai, Vichy livre la plupart des détenus, environ 1 200 « terroristes », aux Allemands. Un convoi de déportation, formé en gare de Penne d’Agenais (Lot-et-Garonne), les emmène à Compiègne. Lors de ce transfert, Boris Frenkel est battu par les nazis. Il est envoyé à Dachau le 18 juin 1944, puis à Mauthausen et Gusen, où il meurt le 21 mars 1945.
Auteur : André Magne
Sources :
Service Historique de la Défense, Vincennes : GR 16 P 23 472.
"Pierre Field et Boris Frenkel, Destins entrecroisés dans le Gers (1940-1942)", Gisèle Polya-Somogyi, Actes du colloque Familles juives dans le Gers durant la Seconde Guerre mondiale, Auch, 21 mai 2008.
Jean-Yves Boursier, La guerre des partisans dans le sud-ouest de la France 1942-1944 - La 35e Brigade FTP-MOI, Paris, L’Harmattan 1992.