Jean Brauman

Légende :

Adhérent du Mouvement de jeunesse sioniste en novembre 1943, Jean Brauman rejoint le maquis de l’Espinassier au printemps 1944 et prête serment à l'Armée juive. Au 6 juin 1944, son maquis devient le peloton bleu-blanc du 4e escadron du Corps franc de la Montagne noire. Après l'attaque allemande du 20 juillet 1944, l'unité est dispersée et Jean brauman revient à Toulouse. Repéré, il est envoyé à Lyon où il intègre le corps-franc du CADJJ (Comité d'action et de défense de la jeunesse juive).

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Mémorial de la Shoah, Paris (France) Droits réservés

Date document : sans date

Lieu : France

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Contexte historique

Jean Brauman naît le 1er janvier 1925 à Lodz en Pologne. Il passe trois ans en Belgique et sept ans au Luxembourg. Sa famille fuit le Luxembourg à cause de l'antisémitisme et arrive à Paris en 1937. Lorsque survient l’exode, son père, son frère aîné et Jean arrivent à 70 km au sud de Bordeaux ; à Langon. Croisant, par hasard, la route d’Allemands venus occuper la région, il devient, involontairement, leur interprète lorsque ceux-ci réalisent qu’il parle parfaitement allemand, à Captieux en Gironde. Personne ne se doute alors qu’il est juif, et son prénom, Jean permet de brouiller les pistes.

Des réfugiés lorrains qui voulaient rentrer à Bar-Le-Duc pour reprendre leur café, proposent à Jean de l’emmener car ses connaissances en allemand sont un atout inestimable. Il y séjourne deux à trois mois, puis il repart pour Paris afin de retrouver sa mère, sa jeune sœur et son frère. Mais en 1941, son frère ainé (3 ans de plus que lui) est arrêté et interné à Pithiviers. Il fait partie des premiers juifs d'origine étrangère convoqués à la Préfecture ! Jean, qui n’a alors que 16 ans, essaie de le faire évader mais son frère refuse pour éviter que son évasion ne retombe sur les épaules de ses autres camarades d’infortune.

En 1942, Jean Brauman travaille dans une entreprise de fourrure qui fabrique des vareuses fourrées pour les Allemands ; il les sabote autant qu’il le peut. Approché par des communistes, il participe à leurs réunions pendant quelques mois puis s’en écarte. Apprenant que son nom figure sur une liste de suspect, il quitte Paris pour Clermont-Ferrand afin d’échapper à une éventuelle arrestation. Interné dans un Groupement de travailleurs étrangers (GTE) pendant un an, il s’en évade et revient à Paris.

En novembre 1943, il rencontre par hasard une ancienne amie, Judith, qui lui explique sa résistance et il adhère alors au Mouvement de Jeunesse Sioniste sous la direction de Lucien Rubel et Tony Gryn. Au début de l’année 1944, il part pour Toulouse avec l’objectif de rejoindre un maquis. Au printemps, il prête serment à l’Armée Juive au maquis de l’Espinassier sous l’autorité de l’adjudant Pierre Loeb.

Malgré un maigre armement, il suit une instruction militaire grâce à un ancien sous-officier de la Légion, Marius Lewenglik, d’origine polonaise. La vie au maquis lui semble rude comme il en témoigne : "Le premier maquis était très dur. Nous n’avions pas un moment de répit. Nous dormions dans les postes avancées, le camp était pratiquement abandonné la nuit de peur d’une surprise ; nous avions construits de petites huttes à 2 ou 3 km du camp où nous partions le soir sauf un groupe qui montait la garde au camp. Je crois qu’il y avait trois huttes. En moyenne, chacun de nous se tapait 11h de garde par 24h. On se relayait de 2h en 2h, c’était exténuant. En dehors de la garde, on faisait les corvées, on allait chercher du ravitaillement, quelque fois à 10 ou 15 km dans la montagne et nous revenions chargés comme des mulets." 

Le but de ce maquis est de former les jeunes juifs pour partir en Palestine, mais Jean reste sur place et, le 6 juin 1944, ce peloton de l’Armée Juive (aussi appelée Armand- Jules, sous son nom de code) s’intègre au Corps Franc de la Montagne Noire, dirigé par le commandant Roger Monpezat. Là il porte des couleurs bleu blanc et forme un peloton original qui revendique son attachement à la judéité en choisissant de s’appeler peloton Trumpeldor (héros juif, sioniste, mort en 1920, en Palestine dans des combats contre les Arabes). Le peloton dirigé par le lieutenant Leblond (Lévy-Seckel) se bat donc au sein du CFMN et harcèle l’ennemi partout où il le peut.

Le 20 juillet 1944, une attaque allemande massive oblige le CFMN à se disperser. Les différentes sections s’éparpillent et le lieutenant Leblond qui connait bien la montagne recherche un abri sûr. Mais il est arrêté, torturé et exécuté par les Allemands. Jean et deux de ses camarades parviennent à s’échapper. De retour à Toulouse, Jean Brauman retrouve son instructeur Marius. Mais dans une rue de Toulouse, ils sont reconnus par un sous-officier allemand qu’ils avaient fait prisonnier et qui s’était échappé du maquis. Profitant d’un moment propice, Jean réussit à s’enfuir, mais Marius et Jean-Jacques Fraimant sont emprisonnés (jusqu’à la libération de la ville par les maquisards).

Jean continue le combat et, sur ordre du capitaine Lazarus, chef OJC-FFI de Toulouse, est envoyé à Lyon où il intègre le corps-franc du CADJJ (Comité d'action et de défense de la jeunesse juive) commandé par le sous-lieutenant Maurice Charleau. Le 24 août 1944, il est blessé au pont de Vaysse au cours d’un affrontement. Hospitalisé à l’Hôtel-Dieu, trépané, il se réveille après huit jours de coma alors que Lyon est libéré.

Pour son action dans la Résistance, Jean Brauman reçoit la croix de guerre et surtout la nationalité française après la guerre. Il est aussi décoré de la Légion d'honneur, de la médaille militaire et de la croix du Combattant volontaire. Dans sa séance du 30 mai 1947, la commission nationale d’homologation des grades obtenus au titre des FFI lui attribue le grade de sergent avec prise de rang au 1er juin 1944.


Auteur : Valérie Pietravalle

Sources et bibliographie :
Service historique de la Défense, Vincennes : GR 16P 88301.
Entretiens de l’auteur avec Jean Brauman, 1987.
Témoignage dactylographié de Jean Brauman (non daté) communiqué par son fils Rony Brauman.
Valérie Ermosilla (Pietravalle), La Résistance juive dans le Tarn 1939-1944, réalités et représentations, mémoire de maîtrise sous la direction de Pierre Laborie et Jean Estèbe, Université Toulouse Le Mirail, 1987.