Le maquis de Biques
Légende :
Une ferme abandonnée à Biques dans le Tarn devient l'emplacement du maquis M7 bis de l'Armée juive.
Genre : Image
Type : Photographie
Source : © Mémorial de la Shoah / Coll. Henri Broder Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique en noir et blanc
Lieu : France - Occitanie (Midi-Pyrénées) - Tarn
Contexte historique
Le 15 novembre 1943, les dirigeants de l’Armée juive décident de créer un maquis autonome avec pour objectif de renforcer le lien communautaire entre les jeunes juifs en les faisant vivre en vase clos pour développer une identité commune sioniste tout en leur fournissant une instruction militaire. Pour son implantation, Raoul Léons, membre de l’AJ et chef de secteur de l’AS, trouve une ferme abandonnée à Biques dans le Tarn, à douze kilomètres au sud d’Alban, dans une région boisée et difficile d’accès : son nom de code devient M7 bis
Le Comité directeur de l’AJ envoie à Biques le rabbin Sal Meyer afin d’y assurer la mise en marche et l’organisation du maquis de Biques. Pour les questions militaires, il est placé sous le commandement direct de Jacques Lazarus. Sur place, Sal Meyer se charge de l’instruction aussi bien morale que militaire des jeunes recrues. Il met également en place la sécurité du maquis avec un système poussé de sentinelles. Maurie Hausner a également des responsabilités dans le commandement de ce maquis. Le 25 janvier 1944, Pierre Loeb (« Pierrot »), qui vient d’arriver avec un groupe de jeunes de l’AJ, est nommé commandant en second en raison de ses aptitudes militaires. Il témoigne « J’étais le plus âgé de ce groupe et le seul à avoir une expérience militaire puisque j’avais fait la guerre. ». Lorsque Sal Meyer quitte Biques en février 1944, Pierre Loeb prend le commandement du maquis. Pour le seconder, la direction de l’AJ envoie Henri Broder. Jacques Lazarus, quant à lui, vient régulièrement de Toulouse en tournée d’inspection.
A Biques se croisent des juifs de toute nationalité, qui ne parlent pas ou peu français, car le Tarn faisait office de longue date de lieu de refuge pour les juifs d’Europe persécutés. Ainsi, parmi les premiers maquisards se trouvent des juifs hollandais passés par la Belgique et désireux de passer en Espagne pour rejoindre les Brigades juives. L’effectif du maquis est alors d’une trentaine d’hommes.
La complicité passive de la population d’Alban et de ses gendarmes qui voit arriver les effectifs venant renforcer l'organisation à intervalle régulier permet la montée en puissance du maquis. Henri Broder décrit néanmoins les conditions précaires d’existence : « Au début, c’était plutôt pénible, car nous n’avions presque pas d’armes, nous montions la garde avec un sifflet. D’autre part, notre ferme était en ruines. Peu à peu, nous avons reçu des armes. Avec des pistolets, nous nous sentions un peu plus sûrs de nous ». Pierre Loeb souligne aussi cette précarité rappelant qu’Henri Broder assurait l’instruction militaire « au besoin avec des manches à balai » à défaut d’armes.
En mars avril 1944, menacés par les Allemands, les maquisards se replient à la Jasse de Martinou, près de la ville de Lacaune, laissant sur place des containers parachutés, heureusement récupérés par Jacques Lazarus avec des complicités locales. A la Jasse de Martinou, plusieurs maquis sont regroupés. Pour afficher leur dimension sioniste, les maquisards juifs portent une épaulette bleu-blanc. Pierre Loeb y commande le 1er peloton avec le grade de sergent-chef et un effectif d’environ quarante hommes. Il est toujours secondé par Henri Broder, notamment pour l’instruction militaire. Lors de la terrible attaque du 20 avril 1944 par les forces allemandes, les maquisards sont contraints d’évacuer le site, après une journée de combat.
Pierre Loeb crée alors le maquis AJ de l'Espinassier, hameau abandonné près de Labastide-Rouairoux. Il y reforme un groupe juif autonome composé d’environ 45 hommes.
Auteur : Guillaume Pollack
Sources et bibliographie :
Mémorial de la Shoah, Paris :
- CDLXIX-36 (« Lt RL à la Main Forte. Rapport sur un travail effectué au mois de novembre et décembre 1943 »).
- DLXI-10, témoignage d’Henri Broder
- DLXI-39 témoignage de Maurice Hausner
- DLXI-65 témoignage de Pierre Loeb
Juifs au Combat, témoignage sur l’activité d’un mouvement de résistance, par Jacques Lazarus (Capitaine Jacquel) chef du groupe parisien de l’Organisation Juive de Combat, Centre de Documentation Juive Contemporaine, Série « Etudes et monographies » n°9, Editions du Centre, Paris, 1947.
Anny Latour, La Résistance juive en France, Stock, 1970.
Valérie Ermosilla (Pietravalle), La Résistance juive dans le Tarn 1939-1944, réalités et représentations, mémoire de maîtrise sous la direction de Pierre Laborie et Jean Estèbe, Université Toulouse Le Mirail, 1987.