Serge Ravanel parle des Chantiers de jeunesse
Légende :
Les Chantiers de la jeunesse française (CJF), souvent appelés chantiers de jeunesse, étaient une organisation paramilitaire française ayant existé de 1940 à 1944.
Genre : Film
Type : Témoignage filmé
Producteur : Alain Vincent
Source : © Archives Alain Vincent Droits réservés
Détails techniques :
Durée : 03 :04 :23 - Extrait : 00 :01 :48 - Interviewer : Alain Vincent - Lieu : Paris - Date : 18/11/03&
Lieu : France - Ile-de-France - Paris - Paris
Contexte historique
Le 30 juillet 1940, une loi crée les Groupements de jeunesse rapidement appelés Chantiers de jeunesse, dans l’optique de la Révolution nationale et dans le cadre des mesures visant à la formation morale et patriotique des jeunes. Ils étaient destinés, sous le commandement du général Joseph de la Porte du Theil, grand admirateur du Maréchal, à regrouper, encadrer et reprendre en main les jeunes conscrits des classes fin 1939 - début 1940 qui n’avaient connu de la vie militaire que la débâcle. La loi du 18 janvier 1941 y mobilise, dans la zone non occupée, tout Français de 20 ans pour un service de huit mois. De la Porte du Theil, Commissaire général, songe naïvement à préparer une armée camouflée de « soldats sans armes », avec des réservistes conservés dans une association des anciens des Chantiers.
Le scoutisme, dont la plupart des cadres étaient des adeptes, inspire leurs principes : on y cultive l’esprit d’équipe, l’honneur, la virilité, on y célèbre la Patrie et le drapeau, on y vit au contact direct de la nature, en secteur rural et en forêt essentiellement. Les « patrouilles » sont dirigées par des « chefs » portant un « insigne » de fonction. La pénurie empêchant la réalisation d’uniformes, les tenues sont assez disparates, même si le vert forestier de la teinture leur donne une certaine uniformité. Discipline militaire, cérémonie des couleurs, défilés, revues, marche au pas cadencé rappellent évidemment les méthodes de l’armée.
Leur activité est essentiellement « forestière et agricole » : forestage, fabrication de charbon de bois, entretien et construction de routes, aides aux récoltes agricoles. La formation est surtout physique (l’hébertisme) et morale (aumônier et pasteur attachés à chaque groupement). Les infirmières de la Croix-Rouge et les assistantes sociales sont les seules représentantes du sexe féminin.
Les conditions de vie sont souvent dures pour les jeunes : nourriture spartiate, hébergement rudimentaire, hygiène difficile… La propagande pétainiste se diffuse au sein des Chantiers par leur encadrement. Des personnalités extérieures y viennent aussi apporter la bonne parole.
L’invasion de la zone non occupée en novembre 1942 bouleverse les Chantiers : des rafles y sont opérées pour le départ en Allemagne. Les Chantiers deviennent un réservoir de main-d’œuvre pour les Allemands qui ne tardent pas à y puiser pour enrichir les effectifs du STO (Service du travail obligatoire). Cette perspective va amener de nombreuses évasions vers les maquis. Les militants communistes se réfugient par petits groupes dans les montagnes et attirent à eux les jeunes gens qui ne veulent pas partir en Allemagne.
Les coups de main de la Résistance sur les Chantiers sont extrêmement nombreux. Réfractaires cachés et maquisards sont dépourvus de tout, aussi cherchent-ils à se procurer l'indispensable. En particulier dans les magasins des Chantiers pour s'emparer des stocks de vêtements : on verra de nombreux maquisards habillés de cet uniforme. Couvertures, couchage, lainages, chaussures, matériel de cordonnerie, blousons de cuir, tissu, sacs à dos, toiles de tente, ravitaillement, conserves, chevaux et harnais, mulets, bétail, fil téléphonique, matériel d'infirmerie, cuisine, voitures automobiles et même un convoi de camions, l’inventaire hétéroclite montre combien la Résistance s’est alimentée et équipée dans les Chantiers de la Jeunesse. Dans de nombreux cas, les gendarmes semblent être de connivence...
Les désertions de jeunes des Chantiers vers les maquis marquent les deux dernières années de leur existence.
Le 10 juin 1944, les Chantiers de Jeunesse sont dissous.
Serge Ravanel discusses the Chantiers de Jeunesse
On July 30th, 1940, Pétain's government passed a law that mandated the creation of youth groups called the Chantiers de Jeunesse. The goal was to teach young men the moral and social values of the Révolution Nationale, and to mold them into true patriots. Led by General Joseph de la Porte de Theil, a loyal supporter of Pétain, the Chantiers would be comprised of the young men who had never entered the military because of the Debacle. They would be graduates from the classes of 1939 and 1940.
The law was passed on January 18th, and it required all twenty year-old men in the Free Zone to serve for eight months. Commissioner General de la Porte de Theil naively believed he was creating an unarmed, secret army with reserves for Vichy France.
This was not to be. Because most of the men were already talented scouts, scouting became a key part of the Chantiers' manifesto as it captured their main principles: teamwork, honor, masculinity, and patriotism. The closeness and emphasis on nature was also an important pillar in Pétain's Révolution Nationale. Leaders, wearing an «insignia», led groups of «patrols», but there were not enough uniforms, and the ones the Chantiers did have did not fit. However, their grass-stained clothes made them easy to identify. Their discipline, ceremony, and orderly marching revealed their military training in spite of a lack of proper uniform.
The Chantiers worked as both «foresters and farmers» primarily. They cut down trees for wood, manufactured wood coal, built and repaired roads, and worked at local farms. Their training was physical (Hebertism) and religious (chaplains and priests accompanied each group). The only women the Chantiers had contact with were Red Cross nurses and social workers.
Living conditions were extremely difficult for the young men. They did not have adequate supplies, shelter, or hygiene... Pétain's propaganda and Christianity were the Chantiers constant influences.
When the Germans invaded the Free Zone in November, 1942, the Chantiers were shocked. It was revealed that the Chantiers would be sent to Germany as reserve laborers, and would bolster the STO. The maquis took advantage and hid in small groups all over to mountains, recruiting any Chantier who did not want to be shipped off to Germany.
The Resistance was enormously successful in this regard. The maquis and other resistance groups were everywhere, and they did not only recruit but also got their hands on the Chantiers' supplies as well as their clothing. Several members of the maquis and other resistance fighters were disguised in the Chantier uniform. Blankets, bedding, wool, shoes, cobbling material, leather jackets, rope, backpacks, tents, supplies, canned goods, horses, mules, livestock, telephone lines, first aid, cars and trucks: the Resistance had the Chantiers who had joined the cause to thank for their impressive inventory. And in some cases, it appears that the Resistance had help from the gendarmes...
The growing number deserters marked the final two years of the Chantiers.
On June 10th, 1944, the Chantiers were officially dissolved.
Traduction : Catherine Lazernitz
Auteur(s) : Robert Serre
Sources : J. de la Porte du Theil, Un an de commandement des Chantiers de la Jeunesse, et Les Chantiers de la Jeunesse ont deux ans, Séquana éditeur Paris 1942 (Ces deux ouvrages rassemblent les bulletins hebdomadaires envoyés par le commissaire général aux groupements). Robert Vaucher, Par nous la France, ceux des Chantiers de la Jeunesse, Séquana éditeur Paris, 1942. Jean Delage, Espoir de la France, les Chantiers de la Jeunesse, Quillet, 1942. Laurent Battut, Le Groupement 22 Des Chantiers De La Jeunesse 1940-1944, Editions Anovi, 2007.