Les Américains à Rambouillet
Légende :
Photographie prise par Roger Deberre, âgé de 16 ans en 1944.
Genre : Image
Type : Photographie
Source : © Collection privée Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique en noir et blanc, 9,6 x 6,8 cm.
Lieu : France - Ile-de-France - Yvelines - Rambouillet
Analyse média
Automitrailleuse américaine devant l’école des filles rue Gambetta à Rambouillet. Tom Reith (lunettes), Elwood Haubrick, Ralph Schroeder à droite. A gauche, près de l’engin, Serge Petit.
AUTEURS : Winieska Françoise,
SOURCES : Août 1944. La Libération de Rambouillet, France, Ed. Shary, 1999
Contexte historique
Le 16 août, les avant-gardes américaines font leur entrée dans Rambouillet. Citons à ce sujet le récit du docteur Rabourdin : "Le 16, vers 15 heures, la première auto-mitrailleuse américaine fit son entrée dans Rambouillet. Montée par quatre hommes, venant du Quartier Général de Maintenon, elle avait pris la route de Gazeran et était entrée dans Rambouillet, par erreur paraît-il. Les Allemands l'accueillirent à coups de mitrailleuses et de canons anti-chars. Arrivée place Félix Faure, elle prit la rue Nationale et pendant qu'elle montait la rue de la République, un de ses hommes, à demi sorti de sa tourelle, répondit de la main au salut que lui adressa de sa fenêtre, M. Ostrowski (...). L'auto-mitrailleuse traversa la place de l'Eglise et descendit jusqu'au bout de l'avenue Foch. En revenant sur son chemin, M. Serge Petit l'arrêta et monta avec les Américains, pour les diriger vers la kommandantur. Dès qu'elle fut engagée dans la rue Gambetta, on vit apparaître le capitaine de gendarmerie Bernier, des gendarmes, le dentiste Schouder, chez lequel les armes étaient déposées, le vicaire M. Renaud, M. Leuques, lieutenant des pompiers, et quelques autres FFI. L'auto-mitrailleuse fut arrêtée devant l'Ecole des Filles par une rafale de mitrailleuse, tirée par des Allemands, embusqués derrière le capot d'une voiture, arrêtée devant la kommandantur. M. Serge Petit mit la mitrailleuse lourde américaine en action; les gendarmes firent feu à leur tour et les Allemands rentrèrent dans la Kommandantur, puis ils en ressortirent dans une voiture commerciale, qui prit à toute vitesse la direction de la gare. M. Serge Petit et M. Lebeau, Inspecteur d'Académie, qui parle anglais, persuadèrent les Américains qui étaient entrés dans l'Ecole des Filles, que le moment était propice pour remonter en voiture et s'échapper. M. Serge Petit les accompagna et en passant devant la Kommandantur, il ouvrit le feu de la mitrailleuse américaine sur une dizaine d'Allemands situés près de la maison du jardinier. L'auto-mitrailleuse fila dans la direction de la gare, passa sous le Pont Hardi, où elle arrosa de balles cinq ou six Allemands qui s'y trouvaient, prit la rue de la Garenne et gagna le Bel-Air ; là par une manœuvre propre à dérouter les Allemands, elle finit par foncer sur la route d'Ablis et rejoignit Maintenon par Orcemont, Orphin. Après le départ de l'auto-mitrailleuse, les FFI entrèrent dans la kommandantur, qu'ils trouvèrent vide. L'abbé Renaud prit les clefs de la villa et alla les déposer à la Gendarmerie française. A ce moment une auto-mitrailleuse allemands apparut dans la rue du Général Humbert. Les FFI prirent la fuite mais une rafale de fusil automatique tua à cent cinquante mètres un FFI, Jean Houff, d'une balle qui traversa la tête de part en part et un autre FFI eut le mollet traversé par une balle. " (Rapport Saintier, 1944).
A la suite de ces échauffourées, les Allemands prirent six otages : l'abbé Renaud, M. Ouvrard, M. Picard et son fils âgé de quinze ans, M. Reby et M. Tessier. Ils furent enfermés dans une grange de la ferme de M. Baron et gardés sous la menace de mitraillettes. Le lendemain, Emile Degois, maire de Rambouillet, est sommé de désigner sept otages à fusiller en échange de ceux arrêtés. Il répond courageusement : "Je ne peux en désigner qu'un seul : moi-même”. Cette digne réponse vaut la libération des otages ("La libération du 19 août 1944", in Toutes les Nouvelles, 14 août 1985). Nous supposons que cette version ne constitue qu'une conclusion partielle sur la libération des otages. Outre l'intervention réelle et courageuse de M. Degois, d'autres facteurs déterminants expliquent la libération des otages deux jours après leur détention : la proximité des Américains et le fait que les Allemands aient été tués par des balles américaines. C'est ce que souligne Serge Petit dans un témoignage : " L'enquête ultérieure des autorités allemandes ne peut que constater, au cours de l'autopsie des cadavres, la marque américaine des balles de la mitrailleuse du char. Quand je pense que j'aurais pu tirer avec une quelconque arme française, je frémis rétrospectivement à l'idée du sort qui aurait été réservé aux otages rambolitains en pareil cas. Fort heureusement aussi, les jeunes FFI qui, au péril de leur vie, essayèrent de s'emparer, quelques instants après notre passage, d'armes allemandes entreposées dans la kommandantur, n'avaient pas d'armes françaises, ou, tout au moins, n'en firent point usage ce jour-là ! " (Serge Petit, "Précisions sur la libération de Rambouillet"). Le même jour, le 16 août, Raymond Saintier met ses deux groupes à la disposition du Capitaine de gendarmerie de Rambouillet. Sur la route d'Epernon, ils établissent le contact avec une patrouille de blindés américains. " De nombreuses reconnaissances furent effectuées en liaison avec les FFI d'Epernon et les troupes alliées. Le 18 août, à 22 heures, je reçus l'ordre de me rapprocher de Rambouillet, afin de pouvoir renseigner les troupes alliées pour l'attaque de la ville.(...) Le 19 août, nous rentrâmes dans Rambouillet, évacuée dans la nuit par les Allemands. " (rapport Saintier, 1944).
Le 18 août, de nombreux bombardements eurent lieu autour de Rambouillet. Et dans la nuit du 18 au 19 août, les Allemands quittèrent la ville : Rambouillet était libéré. Les FFI s'empressèrent de prévenir les Américains du départ des Allemands, ce qui permit d'éviter un bombardement intensif de la ville prévu pour le lendemain. Le 20 août, à 11 heures, les Américains firent leur entrée à Rambouillet. A souligner parmi les libérateurs américains, la présence d'Ernest Hemingway, correspondant de guerre. Enfin, le 22 août fut marqué par le passage de la Division Leclerc et le 23 par l'arrivée du général de Gaulle et de Maurice Schumann. C'est à Rambouillet que de Gaulle annonça à Leclerc que la 2e D.B. devait foncer sur Paris. Ce fut au château de Rambouillet que les deux hommes fixèrent les opérations de marche sur Paris, pour le 24 août.
L'arrondissement de Rambouillet a été le premier arrondissement libéré de Seine-et-Oise. Le 17 août, les Allemands évacuent la région de Houdan et de la Queue-Lez-Yvelines. Dans le même temps, Ablis est également libéré. Une seule victime est à déplorer à Paray-Douaville où un ouvrier agricole est fusillé par les Allemands. Dourdan est libéré le 21 août et Limours le 22. La région de Pontchartrain, quant à elle, n'a été évacuée que le 25 août après plusieurs combats.
SOURCES : Fabrice Bourrée, "la libéation de Rambouillet" in dvd-rom La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.