Jean Sainteny

Genre : Image

Type : Portrait

Source : © Musée de l’Ordre de la Libération Droits réservés

Détails techniques :

Photographie argentique

Date document : sans date

Ajouter au bloc-notes

Contexte historique

Jean Roger est né le 29 mai 1907 au Vésinet dans les Yvelines. Après des études aux lycées Condorcet et Janson-de-Sailly à Paris, il entre tôt dans les affaires et, dès 1929, fait connaissance avec l'Indochine où il séjourne près de trois ans, travaillant dans le secteur bancaire. De retour en France en 1932, il fonde une affaire dans la banque et les assurances qui ne cesse de se développer jusqu'à la guerre.
Mobilisé en 1939 dans l'armée de terre, il se porte volontaire pour un stage d'observateur en avion. Après l'armistice, démobilisé, il se range du côté de ceux qui veulent continuer la lutte. Dès l'automne 1940, il commence à grouper autour de lui, dans le Cotentin, des éléments résolus à résister à l'Occupation. Il recueille ainsi peu à peu des renseignements de grande importance sur l'état et l'organisation des défenses allemandes. Il est par ailleurs, à partir d'octobre 1940, en contact avec le fondateur du réseau de renseignements Alliance, "Navarre" (alias Loustaunau-Lacau). Jean Roger, devenu Jean Sainteny, est arrêté une première fois par la Wehrmacht en septembre 1941 à Colleville-sur-Mer. Incarcéré à Caen et traduit en cour martiale, il est relâché faute de preuves un mois plus tard. Il poursuit son activité, effectuant des missions de liaison en zone sud et franchit 13 fois la ligne de démarcation clandestinement.

Au début de 1942, il met définitivement son réseau normand au service d'Alliance, dans lequel il fait entrer son beau-frère Michel Fourquet. Il organise par ailleurs, l'évasion de Claude Hettier de Boislambert et Antoine Bissagnet de la prison de Gannat en décembre 1942 et facilite le départ de nombreux volontaires pour les Forces françaises libres. Sainteny prend bientôt en main toute la Normandie pour le compte d'Alliance puis la région nord-est de la France. Démasqué en 1943, il est arrêté par la Gestapo le 16 septembre mais réussi a lui échapper deux heures plus tard ; il doit alors vivre dans la clandestinité la plus absolue. 


En mars 1944, suivi de très près par la Gestapo, "Dragon" - alias Jean Sainteny - gagne l'Angleterre par Lysander depuis la région d'Angers. Mais l'arrestation les 16 et 17 mars de nombreux agents et du chef d'Alliance, Paul Bernard, entraîne son retour imprévu en France au bout de trois semaines, malgré les risques encourus. Il parvient alors à réorganiser le réseau décimé par de récentes arrestations. Le 7 juin 1944, trahi, il est arrêté avec un camarade à Paris par la Gestapo après une poursuite mouvementée en voiture. Interrogé par la Gestapo rue des Saussaies, il est torturé à un tel point qu'il est envoyé dans un état critique à l'Hôpital de la Pitié. Miraculeusement guéri, il n'en a pas encore fini avec la Gestapo qui le transfère à nouveau rue des Saussaies pour des interrogatoires complémentaires. Se sachant condamné à une mort certaine, dans la nuit du 4 au 5 juillet 1944, il réussit à s'évader en sciant un des barreaux de sa fenêtre, grâce à la complicité d'un de ses geôliers.

Il quitte Paris, traverse les lignes et arrive au Mans, le 16 août, à l'Etat-major de la 3e Armée américaine du général Patton. Chargé de mission par celui-ci, il retourne à Paris le 19 août et rapporte deux jours plus tard au général américain des renseignements précieux sur la capitale. Ensuite, volontaire pour l'Indochine, il prend, en mars 1945, la direction de la mission militaire française à Kunming ; il est ainsi le premier officier français à reprendre pied à Hanoï après l'effondrement japonais. Nommé Commissaire de la République pour le Tonkin et le Nord Annam en octobre 1945, l'agitation révolutionnaire annamite est à son comble quand Jean Sainteny avec une poignée de compagnons s'installe au Palais du Gouvernement général. Il réussit à négocier avec Hô Chi Minh les accords du 6 mars 1946 qui permettent au général Leclerc d'entrer à Hanoï sans combattre.

Jean Sainteny rentre en France en avril 1946 pour y préparer le séjour de Hô Chi Minh, invité officiel du gouvernement français à la conférence de Fontainebleau qui doit définir la position du Vietnam dans l'Union Française. Lorsqu'éclatent les troubles d'Haïphong en novembre 1946, Jean Sainteny est dépêché à Hanoï par le Gouvernement français. Arrivé seulement le 6 décembre, le 19 il est laissé pour mort dans les combats de rue survenus au cours des événements sanglants qui marquent le début de la guerre d'Indochine. Grièvement blessé, il assume de nouveau cependant, quelques jours plus tard, ses fonctions et reprend officiellement possession du Palais du Gouvernement.

En mars 1947, il est rappelé à Paris pour assister le gouvernement au cours des débats sur les affaires d'Indochine. Prévoyant les suites inévitables de l'engrenage indochinois, il demande et obtient, en décembre 1947, sa mise en disponibilité. Dès lors, il occupe les fonctions de gouverneur des Colonies. En 1953 il publie Histoire d'une paix manquée relatant les troubles d'Haiphong en 1946 et ses souvenirs d'Indochine. En 1954 il est rappelé en activité et nommé délégué général de France au Nord-Vietnam. En 1958 il rentre en France et devient un des leaders de l'Association nationale pour le soutien de l'action du général de Gaulle. La même année, il est nommé membre du Conseil de l'Ordre de la Libération. De 1959 à 1962, il est Commissaire général au Tourisme. Elu député de Paris, il entre au Gouvernement Pompidou en qualité de Ministre des Anciens Combattants et Victimes de Guerre (décembre 1962-janvier 1966). Membre du conseil d'administration d'Air France (1967-1972), il est également président du conseil d'administration de l'Office général de l'Air à partir de 1969. De mars 1968 à mars 1977, il est membre du Conseil constitutionnel. A partir de 1969, continuant à s'intéresser aux affaires vietnamiennes, il met en contact le Président Nixon et Henry Kissinger avec les Nord-vietnamiens pour organiser les négociations secrètes qui doivent mettre un terme à la guerre du Vietnam.

Jean Sainteny est décédé le 25 février 1978 à Paris. Ses obsèques se sont déroulées en l'Eglise Saint-Louis des Invalides à Paris. Il a été inhumé à Aignerville dans le Calvados.

Compagnon de la Libération, Jean Sainteny était titulaire de la Médaille de la Résistance avec rosette.

 

Jean Roger was born on 29 May 1907 in Le Vésinet (Yvelines). After his studies at the Condorcet and Janson-de-Sailly high schools in Paris, he soon started working. From 1929 on, he got to know Indochina where he stayed for almost three years, working in the banking sector. Back in France in 1932, he founded a banking and insurance business that flourished just until the war. Mobilized in 1939, he became part of the ground troops and volunteered for an aviation observation training. After the armistice, demobilized, he joined those who were willing to continue the fight. From autumn 1940 on, he started creating structures, in Cotentin, that were geared to oppose the occupation. Thus, he received, bit by bit, details of a high importance concerning the state and the organization of German defenses. From October 1940 on, he was also in contact with the founder of the information network Alliance, “Navarre” (alias Loustaunau-Lacau). Jean Roger, now named Jean Sainteny, was arrested for the first time by the Wehrmacht in September 1941 in Colleville-sur-Mer. Imprisoned in Caen, he was taken to martial court, but was released due to a lack of evidence one month later. He continued his activities, performing liaison missions in the southern zone and clandestinely crossed the border between the two zones for 13 times.

In the beginning of 1942, he finally integrated his Norman network into the Alliance network, in which he also involved his brother-in-law. Moreover, he organized the escape of Claude Hettier de Boislambert and Antoine Bissagnet from the prison of Gannat in December 1942, and facilitated the departure of many Free French Forces volunteers. Sainteny soon took control over all Normandy for the Alliance network and later over the north-eastern part of France. Uncovered in 1943, he was arrested by the Gestapo on 16 September, but was able to escape only two hours later and was hence forced to live in absolute secrecy.

In March 1944, closely followed by the Gestapo, “Dragon”- alias Jean Sainteny- made it to England in a Lysander, from the region of Angers. But the arrest of many agents and of Paul Bernard, the leader of the Alliance, on 16 and 17 March, caused his unexpected return to France after only three weeks, in spite of the risk of his return. He arrived at reorganizing the network that had been gravely decimated through the latest arrests. On 7 June 1944, betrayed, he and a comrade were arrested by the Gestapo in Paris, after an eventful car chase. Questioned by the Gestapo in rue des Saussaies, he was tortured to such an extent that he was sent to the Hospital de la Pitié, being in very poor conditions. Miraculously recovered, the Gestapo was not finished with him yet and he was once again transferred to rue des Saussaies for additional questionings. Being sure of his condemnation to death, he was able to escape, in the night of 4-5 July 1944, by sawing up the bars of his window, thanks to the complicity of one of his warders.

He left Paris, crossed the lines and arrived in Le Mans on 16 August, at the staff headquarters of the 3rd American Army of General Patton. Charged with a mission by the latter, he returned to Paris on 19 August and only two days later, he provided the American General with precious information about the capital. Afterwards, volunteering for Indochina, he took command of the French military mission in Kunming in March 1945 and was hence the first French officer to go back to Hanoï after Japan’s collapse. Appointed as Commissioner of the Republic for Tonkin and North Annam in October 1945, the revolutionary upheaval in Annam reached its climax, when Jean Sainteny and a handful of his comrades settled in the Palace of the general Government. He was capable of negotiating the accords of 6 March 1946 with Hô Chi Minh, which allowed General Leclerc to enter Hanoï without fighting.

In April 1946, Jean Sainteny returned to France to prepare Hô Chi Minh’s stay, who was officially invited by the French Government to the conference of Fontainebleau, which should define the position of Vietnam in the French Union. When the turmoil in Haïphong escalated in November 1946, the French Government quickly sent Jean Sainteny to Hanoï. Only arrived on 6 December, he was life-threateningly wounded on 19 December during the sudden street fights in the course of several bloody events that were the beginning of the Indochina War. Only some days later, he returned to work, despite his grave injuries, and officially took possession of the Palace of the Government.

In March 1947, he was recalled to Paris to assist the government throughout the debates about the Indochinese affairs. Having foreseen the inevitable consequences of the recent happenings, he demanded and obtained his chairing. From then on, he functioned as the governor of the colonies. In 1953, he published “Histoire d’une paix manquée” (Story of a failed peace), referring to the turmoil of Haiphong in 1946 and to his souvenirs of Indochina. In 1954, he was put in charge again and was appointed as general delegate of France in North Vietnam. In 1958, he returned to France and became one of the leaders of the national Association of the support of General de Gaulle. In the same year, he was appointed as member of the council of the Medal of Liberation. From 1959 to 1962, he was general Commissioner of Tourism. Elected as deputy of Paris, he became member of the government of Pompidou as Minister of Ancient Fighters and Victims of War (December 1962- January 1966). He was member of the administration council of Air France (1967-1972) and from 1969 on, president of the administration council of the general Office of Aviation. From March 1968 to March 1977, he was member of the constitutional Council. From 1969 on, as he continued to show great interest in Vietnamese affairs, he put President Nixon and Henry Kissinger in touch with the North-Vietnamese, in order to organize secret negotiations that should end the Vietnam War.

Jean Sainteny died on 25 February 1978 in Paris. His funeral took place in the Saint-Louise Church of the Invalides in Paris. He was buried in Aignerville (Calvados).

Jean Sainteny received the Medal of Liberation and the Medal of the Resistance, decorated with a bow.

 

Traduction : Felix Uebel


Source : Site internet du Musée de l'Ordre de la Libération