Plaque en l’honneur de Jean Thérond à Valence
Légende :
Plaque apposée sur le mur de la salle des pas perdus du Tribunal
Genre : Image
Type : Plaque
Producteur : Cliché Alain Coustaury
Source : © Collection Alain Coustaury Droits réservés
Détails techniques :
Photographie numérique couleur.
Date document : Sans date
Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Valence-sur-Rhône
Analyse média
Plaque en l’honneur de Jean Thérond apposée sur le mur de la salle des pas perdus du Tribunal de Valence.
Jean Thérond, procureur de la République à Valence, né en 1897 dans le Gard, agit au sein du NAP (Noyautage des administrations publiques). Arrêté le 24 mai 1944, il est déporté vers Dachau le 2 juillet dans le fameux « train de la mort ». Il est un de ceux qui décèdent pendant le transport.
Texte de la plaque :
« À Jean Thérond, magistrat, Mort pour la Patrie, 1897-1944.
Procureur de la République à Valence pendant l’occupation du territoire national, arrêté par l’ennemi le 24 mai 1944. Disparu en captivité. Jean Thérond, avocat général à titre posthume, chevalier de la Légion d’honneur, cité à l’ordre de la Nation, a été et demeurera un exemple d’abnégation et d’héroïsme dans l’accomplissement des devoirs du magistrat. »
La mention « disparu en captivité », assez vague, laisse supposer que les conditions de la mort de Jean Thérond n’étaient pas connues au moment de la pose de la plaque.
Auteurs : Robert Serre
Contexte historique
22 et 24 mai 1944, la Résistance civile est frappée : une rafle et des arrestations sont opérées dans les NAP (Noyautage des administrations publiques) de la Drôme.
France Bastiat, monteur des PTT, dirigeant le NAP-PTT, accueillait souvent chez lui les réunions de son organisation. Il interceptait le courrier de la Kommandantur : les lettres et les télégrammes adressés à la Kommandantur de l’hôtel de Lyon, y compris de nombreuses dénonciations le plus souvent anonymes, passaient auparavant ou disparaissaient entre les mains des chefs de la Résistance. Grâce à Bastiat, aidé par le receveur principal Paul Gateaud, Émile Blachon et le facteur chef Combe, la Résistance connaissait exactement le plan des câbles souterrains à grande distance et les endroits où elle devait les sectionner. Tous les coups de main sont couverts par Bastiat qui coupait le téléphone dans les secteurs où opérait la Résistance.
Le 20 mai 1944, les Allemands font une descente chez Gateaud. Confondu par un papier carbone resté sur la machine à écrire, il est arrêté. Bastiat arrive chez Gateaud vers midi, ne sachant rien de ce qui vient de s’y passer : ce sont les Allemands qui lui ouvrent la porte. Ne pouvant fuir, il joue les naïfs, affirmant qu’il vient rendre un allume-gaz dont Gateaud lui avait confié la réparation, et il appuie ses dires en sortant l’objet de sa poche. C’est assez convaincant et les Allemands le relâchent. Aussitôt, Bastiat entreprend, après s’être assuré qu’on ne le suivait pas, de prévenir tous ceux qui étaient en contact avec Gateaud, de son arrestation, et les inviter à redoubler de prudence. A-t-il fait l’objet d’une filature sans s’en apercevoir, les Allemands l’ayant relâché pour mieux le confondre et procéder ensuite à un vaste coup de filet ? Ses allées et venues ont-elles paru suspectes ? Se sont-ils ravisés ? Ou bien jouaient-ils cruellement au jeu du chat et de la souris ? Là encore tout reste dans le domaine des suppositions. Toujours est-il que Bastiat est arrêté en fin d’après-midi.
Gateaud, extrait de la prison Montluc, sera abattu à Communay, près de Vienne le 9 juin 1944, Bastiat mourra durant son voyage vers le camp de déportation.
Au palais de Justice, les magistrats du siège et du Parquet étaient tenus à une extrême réserve et ne pouvaient aider la Résistance que de manière très discrète. Le Procureur de la République au tribunal de Valence, Jean (-Philippe) Thérond, protestant de stricte observance, laissait mieux voir sa sympathie. C’est lui par exemple qui fait relâcher un jeune réfractaire, Robert, qu’un zélé chef de gendarmerie avait arrêté. Il était en liaison discrète avec Roger Marty, chef de service à la préfecture (qui avait remplacé Loubet comme chef du NAP), et laissait voir sa sympathie pour les prévenus Résistants.
Le 24 février 1944, vers 17 h, la Milice française procède à la préfecture à l’arrestation de deux fonctionnaires : René Jacquet, chef de bureau des Travaux Publics, et Henri Bourg, auxiliaire au service des étrangers, tous deux soupçonnés de trafic de cartes d’identité. Ils vont être jugés à Valence où, leurs dossiers étant vides, le procureur Thérond assure qu’ils devraient être acquittés. Mais on craint de les voir tomber dès leur sortie du tribunal entre les mains de la Gestapo ou de la Milice. Thérond et Marty organisent alors une discrète sortie des inculpés par les couloirs de la gendarmerie contiguë, et leur trouvent un véhicule pour les transporter dans une cachette sûre. Les miliciens arrêtent Thérond le 24 mai 1944, à la pointe du jour, l’accusant d’apporter son aide à la Résistance. Ce père de famille nombreuse est remis à la Gestapo et conduit à Lyon, au fort Montluc. Il mourra durant le transport à Dachau.
Les services de police allemande arrêtent aussi le préfet de la Drôme, Robert Cousin, à son domicile, une villa de l’avenue Victor Hugo à Valence. Il sera déporté à Flossenbürg.
Cette affaire semble liée à l’arrestation d’un radio des MUR (Mouvements unis de la Résistance) le 22 mai sur le pont du Rhône à Valence. Selon un courrier de « Cinq-Mars » (Claude Alphandéry) du mercredi 24 mai, « ce radio d’Alger a copieusement parlé. Il est à l’origine sans doute des arrestations PTT. Tous les codes sont brûlés ».
Auteurs : Robert Serre
Sources : AN, BCRA, 3AG2/478-171Mi189. AN, F/1CIII/1152 juillet 1944. SHGN, rapports R4 Cie Drôme. ADD, 255 W 89. Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, les déportés politiques, résistants, otages, nés, résidant ou arrêtés dans la Drôme, éd. Peuple Libre / Notre Temps, avril 2006. Fondation pour la mémoire de la déportation, le Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression et dans certains cas par mesure de persécution 1940-1945, Paris, éditions Tirésias, 2004. tome I, 1 446 pages, tome II, 1 406 pages, tome III, 1 406 pages, tome IV, 1 282 pages. La Picirella, Témoignage sur le Vercors, 1991. Pour l’Amour de la France. Pierre Vallier, in Dauphiné Libéré du 2 avril 2000. Archives Vincent-Beaume L.F Ducros, Montagnes ardéchoises dans la guerre, tome 2.