Plaques aux Barraques-en-Vercors
Légende :
Plaques commémorant l'ouverture de la route des Grands Goulets, en 1851, et le combat du 22 janvier 1944 aux Barraques-en-Vercors, commune de La Chapelle-en-Vercors.
Genre : Image
Type : Plaque
Producteur : Cliché Alain Coustaury
Source : © AERD, fonds Alain Coustaury (Verso : D. Gachon) Droits réservés
Détails techniques :
Photographie argentique couleur.
Date document : juillet 2006
Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - La Chapelle-en-Vercors
Analyse média
Les deux plaques sont apposées sur la falaise qui domine la route départementale 518. Cette voie de pénétration du massif, empruntant la cluse des Grands Goulets n'a été ouverte qu'au XIXe siècle. Elle est l'un des rares accès au cœur du massif. La route des Grands Goulets, spectaculaire par ses tunnels et sa construction en encorbellement mais dangereuse à cause de son étroitesse et des risques d'éboulement, est fermée depuis l'ouverture d'un tunnel en 2007. Elle pouvait être contrôlable par la Résistance en la minant ou en établissant une barricade.
La plaque concernant le combat laisse planer un doute quant au sort des résistants. « Succombèrent » ne signifie pas qu'ils furent tués. Ils se replièrent devant la puissance de feu des Allemands pourvus en artillerie et supérieurs en nombre.
Auteurs : Alain Coustaury
Contexte historique
L'escarmouche des Barraques résulte d'une opération répressive conduite par les Allemands à la suite de l'arrestation de trois des leurs. Elle peut être considérée comme la première incursion militaire allemande sur le massif du Vercors.
Le 19 janvier 1944, deux Allemands, le major Bold, directeur du service allemand de la main-d'œuvre de la Drôme et son interprète, Schoenfeld, ainsi qu'un journaliste hollandais, H. Honeke, qui déjeunaient à La Chapelle-en-Vercors, sont repérés par un Résistant, le lieutenant Lotsitski. Ne pouvant emprunter la route du col de Rousset, enneigée, ils repartent vers Valence-sur-Rhône par les gorges de la Bourne. Ils sont interceptés par le groupe de Résistants commandés par Lotsitski.au nord de Saint-Julien-en-Vercors. Bold est légèrement blessé. Les deux Allemands et le journaliste sont conduits au PC de Narcisse Geyer (« Thivolet »)
Le 20 janvier, quatre gendarmes allemands, en voiture, recherchent leurs compatriotes. Vers 12 h 30, leur véhicule est immobilisé par une congère après le hameau de Rousset. Revenant à pied vers Rousset pour trouver des secours, ils sont pris sous le feu du groupe franc de Raoul Roudet. Un des gendarmes est tué, les autres s'enfuient. Ils sont récupérés avec difficulté par des compatriotes après avoir menacé Jeanne Bordat qui les avait reçus dans son hôtel : « Nous reviendrons demain pour tout brûler ».
Geyer, à la suite de l'action du groupe franc Roudet, est convaincu que les Allemands vont réagir brutalement. Il place tout son secteur en état d'alerte maximum, de la Goule-Noire au col de Rousset.
Effectivement, le 22 janvier une forte colonne allemande de 300 hommes traverse Saint-Laurent-en-Royans, passe les tunnels des Petits Goulets et s'engage sur la route qui monte vers les Grands-Goulets. Elle est attaquée au niveau du pont de la Vernaison par les Résistants du camp 10 d'Échevis. L'accrochage dure plus d'une heure. Les Résistants débordés, manquant de munitions décrochent vers Échevis. La colonne allemande continue sa montée et débouche des tunnels des Grands Goulets, au niveau du hameau des Barraques-en-Vercors. Les Résistants retranchés dans les maisons essaient vainement de ralentir l'avancée allemande. Les canons de 37 tirent des obus incendiaires. Le hameau est détruit. Les Résistants ne peuvent que se replier.
Le gros de la colonne allemande poursuit vers La Chapelle-en-Vercors, ayant envoyé une patrouille en direction de Saint-Martin-en-Vercors. Cette dernière abat André Roure, Résistant revenant d'une mission à Lyon.
À La Chapelle-en-Vercors quelques maisons sont incendiées mais les bons soins donnés au soldat blessé le 20 janvier évitent une répression plus sévère. Une partie de la colonne continue vers Saint-Agnan-en-Vercors, brûle la scierie Morin à Rousset.
Le bilan de cette journée est de trois morts, des blessés du côté allemand, deux morts et trois blessés du côté de la Résistance.
Des demandes de remboursement de frais par les autorités allemandes auprès des autorités françaises permettent d'apprécier ce que coûte ce type d'opérations contre la Résistance.
Objet : acte de sabotage contre le sergent Clemens Baker le 22 janvier 1944 ; montant du dommage : 2 817 francs. Le 22 janvier 1944, le détachement de la police de protection envoyé pour une action contre des terroristes, circulant sur la route en montagne de Sainte-Eulalie sur les Barraques en Vercors, fut attaqué par des terroristes et Baker fut tué d'un coup de feu à la tête. Le dommage résultant s'élève, d'après les documents en notre possession, et que vous pouvez consulter si vous le désirez, à 2 817 francs. D'après les dispositions en vigueur, l'Etat français est responsable des dommages. En conséquence, vous êtes prié de faire payer la somme ci-dessus d'ici au 23 août 1944 à la banque suivante (banque de France Lyon). Comme une pension devra être payée à la famille de la victime, vous recevrez encore à ce sujet une demande spéciale de paiement - Signé illisible.
Objet : acte de sabotage contre le sous-officier Karl Blech, le 22 janvier 1944, à Rousset. Indemnité : 2 724 francs. Le 22 janvier 1944, le sous-officier Karl Blech fut mortellement blessé par des terroristes et mourut peu après. Des documents que nous avons ici ressort sans discussion la preuve du sabotage. Les frais résultant jusqu'ici s'élèvent à [...] et se rapportent à l'enterrement, à l'habillement et à l'équipement comme aux effets personnels endommagés [...] comme une rente devra être payée à la famille de la victime, le montant de cette rente sera indiquée avec une invitation spéciale à en effectuer le paiement - Signé intendant-capitaine Meyer.
Ces demandes sont envoyées à la préfecture de la Drôme.
Au-delà de ce bilan financier qui montre le résultat de la l'action de la Résistance, les faiblesses de celle-ci sont mises en évidence : faiblesse numérique (70 Résistants environ contre 300 Allemands), faiblesse de l'armement (manque de mortiers, pénurie de munitions), faiblesse de l'encadrement et de l'entraînement).
Auteurs : Alain Coustaury
Sources : Patrick Escolan, Lucien Ratel, Guide-mémorial du Vercors combattant, 1994, Le Cherche-midi, 406 pages.