Le docteur Léon Martin
Légende :
Le docteur Léon Martin, ancien député (1936-1940) et maire de Grenoble (1932-1935, puis à nouveau de 1945-1959) militant socialiste et franc-maçon, membre du mouvement Franc-Tireur, et pionnier des premiers camps du Vercors, dits "camps-refuges", avec Aimé Pupin - sans date
Genre : Image
Type : Photographie
Source : © MRDI de Grenoble Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique en noir et blanc.
Date document : Sans date
Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Isère - Grenoble
Analyse média
Pour en savoir plus :
De Lyon au Vercors : les principes de développement territorial du mouvement Franc-Tireur, 1941-1942 (J. Guillon)
La genèse de la Résistance, les phases de l'évolution de la gouvernance (G. Giraud)
Les origines du Vercors vues par Aimé Pupin, dit Mathieu (retranscription)
Auteurs : Julien Guillon et Guy Giraud
Contexte historique
Né le 20 décembre 1873 à Saint-Martin-de-Clelles (Isère) ; docteur en médecine et en pharmacie ; militant socialiste ; maire de Grenoble (1932-1935 ; 1945-1959) ; député (1936-1940).
Léon Martin naquit dans une famille d’exploitants agricoles. Après l’école primaire, il fit ses études secondaires au collège de La Mure et devint bachelier. Il poursuivit ensuite des études médicales à Grenoble puis à Lyon, fut interne des hôpitaux puis docteur. Au doctorat en médecine, il ajouta le doctorat en pharmacie. En 1899, il s’installa à Grenoble. Nommé professeur de chimie et de toxicologie à l’école de médecine et de pharmacie de la ville, il y exerça pendant trente ans, cumulant bientôt ses fonctions professorales avec celles de directeur de l’école. Il se serait engagé dans l’armée, mais atteint d’une maladie pulmonaire, aurait été réformé en 1909. Sa carrière connut une interruption, celle de la Première Guerre mondiale : mobilisé en août 1914 et dispensé d’obligations militaires, il s’engagea volontairement en septembre, après la bataille de la Marne, passa cinquante-deux mois au front et fut démobilisé le 19 janvier 1919 avec trois citations et la Légion d’honneur. Il reprit à Grenoble sa vie professionnelle et aussi l’action politique dans laquelle il s’était engagé jeune étudiant. Au cours de ses années d’internat à Lyon, de 1894 à 1899, il avait participé au combat dreyfusard qui le marqua profondément et adhéré à la Ligue des droits de l’Homme et du citoyen en 1894 et, la même année, à un groupement socialiste. Quand il s’installa à Grenoble, il était donc prêt à rejoindre une Fédération socialiste, liée au Parti ouvrier, que le succès d’Alexandre Zévaès aux élections législatives de 1898 avait rendue dynamique.
Les 29 et 30 juillet 1905 naquit au congrès de Grenoble, la Fédération socialiste SFIO de l’Isère : le docteur Martin devait en être pendant plus de cinquante ans l’une de ses figures de proue par son ardeur au travail, ses compétences, ses convictions socialistes d’une fermeté à toute épreuve comme il allait en donner maintes preuves.
En 1925, il entra à l’hôtel de ville de Grenoble et, dans la municipalité de Paul Mistral, fut adjoint chargé de l’instruction publique et de l’hygiène. En 1932, succédant à Paul Mistral décédé, le docteur Martin devint maire de Grenoble. Tout naturellement, la Fédération socialiste de l’Isère le chargea de conserver son siège de député en octobre 1932 : il n’y parvint pas.
Léon Martin s’attacha à l’hôtel de ville à la poursuite de l’œuvre d’administration et de transformation de Paul Mistral. Président de l’Office des HLM, il fit construire des logements populaires autour de la ville et à proximité des grands groupes scolaires. Il fit raser la dernière ceinture de fortifications de Vauban, allant de l’Isère au Drac et obtint la création d’une régie foncière pour réaliser ces travaux et assurer le développement de la ville. Il créa l’Amicale laïque qu’il présida pendant trente ans et organisa des fêtes annuelles de la Jeunesse qui connurent la faveur du public. Il soutint l’enseignement à tous les degrés et assura une promotion de l’enseignement technique en créant une école hôtelière rattachée au collège technique. Il fit édifier un grand stade ouvert à toutes les compétitions et un parc des sports. En 1935, malgré cette œuvre qui plaidait en sa faveur, Léon Martin fut chassé de la mairie par une coalition ouverte des radicaux et de la droite.
Au Parlement, il s’intéressa surtout à l’enseignement et singulièrement à l’enseignement artistique, ainsi qu’à l’hygiène et à la santé publique. Le 10 juillet 1940, devant l’Assemblée nationale de Vichy, fidèle à son passé, Léon Martin vota contre l’octroi des pouvoirs constituants au maréchal Pétain.
Sous l’Occupation, il fut un des créateurs et animateurs du réseau Franc-Tireur, travailla à la distribution de journaux et de tracts vers les Hautes-Alpes et les deux départements savoyards, à l’évasion des requis du STO (Service du travail obligatoire en Allemagne) vers les régions montagneuses et boisées de la Chartreuse, d’Allevard, de l’Oisans, du Trièves et du Vercors. Le 4 avril 1943, il fut arrêté par les troupes italiennes d’occupation et enfermé au fort de l’Esseillon, dans le Mont-Cenis. Le 9 septembre 1943, Léon Martin, put s’évader, comme tous ses compagnons de captivité, à la faveur de l’armistice signé par le gouvernement italien de Badoglio. Il gagna le centre de la France, notamment le département de la Creuse, sous le nom de "Michon".
Il revint à Grenoble libérée le 15 septembre 1944. Léon Martin refusa toute candidature aux deux Constituantes, à l’Assemblée nationale ainsi qu’aux élections cantonales. Ce n’est que sous la pression des militants qu’il reprit la lutte sur le plan municipal ; il fut élu maire le 6 mai 1945, réélu en 1946, 1947, 1949 et 1953. Il quitta la vie politique en abandonnant le fauteuil de maire en 1959. Pendant quatorze nouvelles années, il avait présidé à l’essor de Grenoble dans tous les domaines : l’école et l’Université, l’enseignement technique et la houille blanche, le tourisme et l’industrie. Sous son administration, la surface de la ville de Grenoble a doublé.
Chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire, décoré de la Médaille de la Résistance et de la médaille des 80, Léon Martin fut fait commandeur de la Légion d’honneur en 1955.
Il devait survivre huit ans à sa retraite et s’éteindre à l’âge de 94 ans, le 24 juin 1967, à Grenoble. Il avait eu un fils, Georges, médecin comme lui.
Auteur : Justinien Raymond pour le site du Maitron en ligne
Sources :
Arch. Ass. Nat., dossier biographique.
Jean Jolly, Dictionnaire des Parlementaires, Paris, PUF, 1960-1977, t. VII, pp. 2386-2387.
Hubert Rouger, Les Fédérations socialistes, t. II, pp. 242 et sq.
Pierre Barral, Le Département de l’Isère sous la IIIe République : 1870-1940, Thèse, Paris, Colin, 1962 (passim).
G. Lachapelle, Les Élections législatives de 1936.
Le Petit Dauphinois, octobre 1932.
Le Monde, 27 juin 1967.
Arch. Ass. Nat., 202.
Le Livre d’Or des 80.
Le Vétéran socialiste, n° 21, avril 1963.
Notes de Gilles Morin.
Enquête auprès du docteur Léon Martin (avril 1957).