Premier conseil fédéral de la SFIO des Bouches-du-Rhône, Le Provençal, novembre 1944
Légende :
Article « Prélude au congrès national. Le premier conseil fédéral de la Fédération socialiste des Bouches-du-Rhône a tenu ses assises à Marseille », paru dans Le Provençal, 7 novembre 1944
Genre : Image
Type : Article de presse
Source : © Collection Robert Mencherini Droits réservés
Détails techniques :
Document imprimé sur papier journal avec reproduction de photographie analogique en noir et blanc [Voir recto-verso].
Date document : 7 novembre 1944
Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille
Analyse média
Cet article, à la une du Provençal du mardi 7 novembre 1944, donne le compte rendu de la première réunion – après la Libération - du comité fédéral de la SFIO des Bouches-du-Rhône, qui a eu lieu le dimanche au siège du Parti socialiste, 53 rue-Grignan. Il est mis en valeur par une photographie de la tribune de ces assises.
Après une brève allocution de François Bernardi, secrétaire fédéral, la matinée est consacrée au bilan de l’activité des socialistes dans la région, pendant les années noires, dont Horace Manicacci, responsable régional clandestin du Parti pendant l’Occupation, et Paul Trompette, organisateur des Milices socialistes, font le récit. Gaston Defferre, secrétaire général adjoint du Parti, responsable pour la zone Sud, revient, de manière plus large sur la reconstitution clandestine du parti et sur son action dans la Résistance. Il insiste sur le rôle de premier plan du PS dans la création du CNR, évoque ses propres missions à Londres et à Alger, se félicite de l’efficacité des groupes armés socialistes au moment de l’insurrection.
La séance de l’après-midi porte sur les questions organisationnelles et sur l’orientation politique. Francis Leenhardt, « venu passer un moment au congrès », évoque favorablement l’unité entre le MLN et le FN. Gaston Defferre rend hommage au programme républicain du général de Gaulle et prend position pour l’unité de la classe ouvrière face aux trusts. Les parlementaires ayant voté les pleins pouvoirs à Pétain le 10 juillet 1940 sont exclus, ainsi que les élus compromis avec le régime de Vichy. François Bernardi est reconduit dans ses fonctions fédérales. Diverses commissions et des responsables sont désignés, par exemple, Lucette Tourret comme responsable des femmes socialistes.
L’assemblée se clôt par la désignation des délégués au congrès national extraordinaire « des cadres des Fédérations socialistes reconstituées dans la clandestinité », convoqué à Paris du 9 au 12 novembre. On note, parmi eux, Gaston Defferre, Jean Malacrida, Horace Manicacci, Joseph Féraud, Lucette Tourret et Paul Trompette.
Robert Mencherini
Contexte historique
Cet article est significatif de la volonté du Parti socialiste-SFIO de se reconstituer rapidement, localement et nationalement. Dès le 5 septembre 1944, des affiches socialistes, apposées sur les murs de Marseille, ont incité à reprendre le travail et à se mobiliser pour « une République forte et organisée ». Le samedi 4 novembre 1944, le PS inaugure son nouveau siège, 53, rue-Grignan, par des manifestations artistiques. Le lendemain, le conseil de la fédération départementale socialiste réunit les sections de Marseille et les sections rurales.
Les rapports des renseignements généraux fournissent, sur cette réunion, des renseignements complémentaires à ceux de l’article. Une question brûlante de ces assises est celle des parlementaires qui ont voté la confiance au maréchal Pétain. Il est décidé, par quarante voix contre cinq et trois abstentions, d’exclure ces élus. Rappelons que Félix Gouin est le seul parlementaire du département a avoir voté « Non », le 10 juillet 1940. Il est donc le seul à conserver son mandat. Le sénateur Léon Bon, les députés Fabien Albertin, Toussaint Franchi, Albert Lucchini, Raymond Vidal sont exclus du parti. Il en est de même pour les élus municipaux ou départementaux qui ont voté des motions de confiance au gouvernement de Vichy. Toutefois, certains peuvent être repêchés par une commission de recrutement, si leur action est considérée comme « non déterminante ». Les renseignements généraux notent que dans ce débat - assez confus, selon eux – les jeunes ruraux jouent un rôle déterminant.
Il est à noter que, dans les échanges sur les grandes questions de l’heure, Gaston Defferre occupe une place importante. Il appelle à soutenir l’action du général de Gaulle en faveur de l’ordre républicain et des grandes réformes économiques. Elles rejoignent, selon lui, celles proposées par le Parti socialiste. La lutte contre les puissances d’argent, dit-il, nécessite l’unité avec le Parti communiste, mais les socialistes doivent apparaître en tant que tels. Les positions de Gaston Defferre sont confortées par la place occupée, dans la une du Provençal du même jour, par le discours très social du général de Gaulle à Grenoble. Gaston Defferre est également à l’honneur, avec une photographie en haut de page, aux côtés de Max Juvénal pour sa désignation à l’assemblée consultative provisoire. Il est l’un des premiers intervenants au congrès national. Il présente, lors de la séance d’ouverture du jeudi 9 novembre, le bilan du « regroupement de la zone Sud ». Incontestablement, le président de la délégation municipale de Marseille apparaît comme l’homme fort du Parti socialiste reconstitué.
Auteur : Robert Mencherini
Sources :
Archives Départementales (AD) des Bouches-du-Rhône 149 W, informations des renseignements généraux ;
Archives Nationales (AN) - F1a 3237, Parti socialiste (section française de l’internationale ouvrière), Congrès national extraordinaire des Cadres des Fédérations socialistes reconstituées dans la clandestinité, 9-12 novembre 1944, Paris ;
Robert Mencherini, La Libération et les années tricolores (1944-1947). Midi Rouge, ombres et lumières, tome 4, Paris, Syllepse, 2014.