Article "Le QG des affaires civiles des armées alliées", Le Provençal, 12 septembre 1944
Légende :
Article de presse intitulé « Une création intéressante - Le QG des affaires civiles des armées alliées », paru dans La Marseillaise, 12 septembre 1944
Genre : Image
Type : Article de presse
Source : © Collection Robert Mencherini Droits réservés
Détails techniques :
Document imprimé sur papier journal (voir recto-verso).
Date document : 12 septembre 1944
Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille
Analyse média
Cet article du Provençal daté du 12 septembre 1944 rend compte de la création, à Marseille, du QG des affaires civiles (Civil Affairs), un service de liaison ayant vocation à établir le contact entre les autorités du GPRF et les armées alliées. Il est précisé que les compétences de ce service s’étendent sur toute la zone Sud et que ses attributions, variées et mises en œuvre par différentes sections, traitent des opérations (militaires), des affaires économiques et fiscales, et du ravitaillement.
L’article insiste plus particulièrement sur l’action du service chargé du ravitaillement, qui prend en compte aussi bien les besoins des armées, que ceux des populations. L’aide américaine dans ce domaine est salué par le journaliste, qui rend notamment compte de la livraison d’un bateau de vivres seulement dix jours après leur débarquement, ou encore de distribution de denrées alimentaires dans les Basses-Alpes, mais également à Nice par voie maritime.
Il est également souligné que les demandes exprimées par les armées alliées prennent en compte les besoins des populations et la rareté de certains produits dans la région, afin de ne pas priver les civils de certaines denrées qui viendraient à manquer. L’article se conclut sur la satisfaction, exprimée par les officiers américains des Affaires civiles, de travailler avec les nouvelles autorités françaises, « dont ils apprécient la compétence et la faculté d’adaptation aux circonstances difficiles du moment ».
Cette rencontre avec la presse, où le QG des Affaires civiles se présente comme un « pur organisme de liaison » œuvrant notamment pour répondre aux besoins de la population en ravitaillement, peut être perçue comme une tentative de rassurer le GPRF quant à la volonté présumée des Alliés d’imposer leur autorité dans les régions libérées.
Laetitia Vion
Contexte historique
Les consignes du général de Gaulle concernant les relations à entretenir avec les Alliés, et notamment avec les Américains, sont annoncées à Raymond Aubrac dès sa désignation comme Commissaire régional de la République à Marseille, au début du mois d’août 1944. Il s’agit de ne pas laisser les Américains imposer un contrôle et un pouvoir trop important sur la France et les nouvelles autorités civiles qui sont progressivement mises en place. L’objectif étant d’asseoir la légitimité du GPRF et d’affirmer la place de la France aux côtés des Alliés.
Les officiers américains des Civil Affairs (affaires civiles), qui arrivent à Marseille avec les troupes débarquées, sont chargés de faire le lien avec ces nouvelles autorités françaises, dont Raymond Aubrac, qui, lors de sa première conférence de presse, s’applique à cantonner les Alliés à leur strict rôle militaire. Les membres des Civil Affairs, lors notamment de leurs déclarations à la presse, se présentent en retour comme un pur organisme de liaison ayant comme objectif la bonne coopération avec les autorités françaises pour reconstruire le pays et parvenir à la victoire totale sur les troupes allemandes.
Cet organisme est en effet chargé de faire connaître aux autorités françaises les besoins des armées alliées, mais également de répondre à ceux des populations, notamment en ravitaillement. Sur d’autres sujets, comme la main-d’oeuvre, des tensions persistent. Raymond Aubrac refuse par exemple de mobiliser ou de réquisitionner des travailleurs pour répondre aux besoins des Américains. Ces derniers, à la fin septembre, décident donc de transférer 14 000 prisonniers italiens pour les employer au déchargement et à l’acheminement de matériels et marchandises depuis le port de Marseille.
Le 23 octobre 1944, les Alliés reconnaissent officiellement le GPRF, ce qui contribue sensiblement à améliorer les rapports et la coopération entre les militaires américains et les nouvelles autorités françaises.
Auteurs : Laetitia Vion et Robert Mencherini
Sources :
Robert Mencherini, La Libération et les années tricolores (1944-1947), midi rouge, ombres et lumières, tome IV, Paris, Syllepse, 2014.