L'épuration au sein de l'Assistance publique, décembre 1944
Légende :
La commission permanente d'épuration propose au Commissaire régional de la République des sanctions contre deux cadres de l'Assistance publique, 8 décembre 1944
Genre : Image
Type : Correspondance officielle
Source : © AD B-d-R 149 W 154 Droits réservés
Détails techniques :
Document dactylographié sur papier pelure d'une page.
Date document : 8 décembre 1944
Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille
Analyse média
La commission permanente d'épuration dépendant du comité départemental de Libération transmet au Commissaire régional de la République les dossiers envoyés par les instances locales d'épuration avec ses propositions de sanction ou de classement.
Le comité de vigilance de l'Assistance publique a effectué une enquête préliminaire et saisi la commission permanente d'épuration de deux cas.
Le premier concerne une directrice de maternité. Il lui est reproché d'avoir manifesté son adhésion au régime de Vichy. La commission propose une mesure de suspension provisoire en attendant la conclusion de son enquête.
Le deuxième cas est celui d'un économe d'hôpital. Curieusement, si son attitude pendant l'Occupation est qualifiée de « particulièrement odieuse au point de vue professionnel » sans plus de précisions, son comportement privé est davantage décrit et invoqué à charge : « On le signale comme un mauvais père de famille, de mœurs plutôt légères et de conduite déplorable ». La sanction proposée est une suspension suivie d'une mise à la retraite anticipée, mesure qualifiée de « légère » pour un homme ayant quatre enfants à charge et dont l'aîné est âgé de 18 ans. En l'absence de précisions sur le comportement professionnel de cette personne, il est difficile de savoir dans quelle mesure la vie privée a pesé sur la décision de la commission.
Sylvie Orsoni
Contexte historique
L'ordonnance du 27 juin 1944 codifiant l'épuration administrative est une des premières ordonnances consacrées à la répression de la collaboration. L'épuration de l'administration française a toujours été considérée comme une priorité par les représentants des organismes et partis de la Résistance qui siégeaient à l'Assemblée consultative d'Alger.
L'article 2 de l'ordonnance du 27 juin 1944 étend la définition du fonctionnaire à tout employé travaillant pour un organisme bénéficiant d'argent public. Sont donc concernées les administrations, les collectivités et les entreprises publiques, comme ici l'Assistance publique.
L'article 3 prévoit la suspension et, si besoin, l'incarcération préventive du fonctionnaire ou agent public, incriminé pendant la durée de l'enquête. Le fonctionnaire perçoit pendant cette période la moitié de son traitement. Les indemnités familiales ne sont pas suspendues.
L'article 4 énumère les sanctions disciplinaires, allant du déplacement d'office à la radiation.
Les sanctions administratives n'excluent pas d'éventuelles poursuites pénales (article 5) ou des mises sous séquestre des biens des personnes poursuivies (article 8). En cas de classement sans suite, le fonctionnaire est rétabli dans ses droits et bénéficie d'une reconstitution de carrière rétroactive (article 6).
La commission permanente d'épuration comme les comités de vigilance locaux appliquent donc l'ordonnance du 27 juin 1944 en soumettant au Commissaire régional de la République - qui représente l'État - les propositions de sanctions administratives qui n'excluent pas des poursuites pénales.
Auteur : Sylvie Orsoni
Sources :
Robert Mencherini, La Libération et les années Tricolores (1944-1947). Midi rouge, ombres et lumières, tome 4, Paris, Syllepse, 2014.
Henry Rousso, « L'épuration en France, une histoire inachevée », in Vingtième siècle, PFNSP, n° 33, 1992, pp. 78-105.