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Brassard du mouvement Ceux de la Résistance

Légende :

Brassard du mouvement Ceux de la Résistance.
Au verso, capture d'écran du film "Comment sont nés les FFI ?" (INA) avec un brassard CDLR de confection artisanale datant de la période insurrectionnelle.

Genre : Image

Type : Brassard

Source : © Collection Maurice Bleicher Droits réservés

Détails techniques :

Brassard tricolore avec écusson brodé

Date document : 1944

Lieu : France - Ile-de-France

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Analyse média

Sur une bande de tissu tricolore a été ajouté un écusson avec croix de Lorraine rouge en son centre, etourée des lettres CDLR.

Cet écusson correspond en tout point à l'insigne recommandé par Vaillant (De Vogüe) dans sa note du 12 août 1944 (voir média lié). L'insigne étant destiné à compléter le brassard FFI tel que conseillé par le colonel Rol-Tanguy dans sa note du 27 juillet 1944 sur les brassards FFI : "En dehors du brassard des combattants des FFI, ils peuvent porter l'insigne de leur mouvement".

Dans une autre note qu'il adresse à Roger Cocteau-Gallois, chef d'état-major des FFI d'Ile-de-France, le 18 août 1944, Jean de Vogüe écrit : "Je tiens à ce qu'en dehors du brassard FFI, tous nos combattants portent l'écusson CDLR dont le modèle a du vous parvenir (dimensions 7/9/11, fond azur, croix rouge, lettres jaune or, encadrement bleu foncé) - Frédérique s'efforce de trouver quelqu'un qui les fabrique en série. Dans ce cas, elle vous préviendra".

Il est difficile de dire si ce brassard correspond à une fabrication de l'après-libération ou si il a été confectionné en série avant ou pendant la période insurrectionnelle. 


Auteur : Fabrice Bourrée
Sources :
Archives nationales, 72 AJ 2303 (fonds Jean de Vogüe)

Contexte historique

Le mouvement Ceux de la Résistance est un des cinq grands mouvements de zone nord. Il est l'héritier du mouvement Combat zone Nord fondé durant l'hiver 1940-1941 et décimé par une vague d'arrestations en février 1942. Jacques Lecompte-Boinet appartenait depuis peu de temps à ce mouvement lorsque les arrestations commencèrent. Le fait qu'il n'était pas ou peu connu lui permit de ne pas être inquiété par les autorités allemandes. Entre février et septembre 1942, Lecompte-Boinet essaye par tous les moyens de reconstituer le mouvement et de renouer le contact avec le mouvement Combat de zone sud. Par l'intermédiaire d'Henry Ingrand, il parvient à se procurer une liste de contacts et à faire ainsi de nouvelles recrues. En juin 1942, grâce au banquier Pierre Lebon, Lecompte-Boinet fait la connaissance de Pierre Arrighi qui allait devenir son adjoint malgré son jeune âge. Les tentatives de Lecompte-Boinet d'affilier son groupe à Combat se soldèrent par des échecs, Frenay jugeant impossible d'organiser un mouvement en zone Nord. Il décide alors de créer son propre mouvement indépendant qui prend le nom d'Organisation nationale de la Résistance (ONR).

En novembre 1942, après l'invasion de la zone sud par les Allemands, Frenay décide de reconstituer sa filiale de zone Nord et de reprendre contact avec Lecompte-Boinet. En décembre 1942, il charge un de ses agents de cette mission, Jean de Vogüé, qui devient ainsi représentant de Combat en zone nord. Mais lorsque de Vogüé parvient enfin à rencontrer Lecompte-Boinet en mars 1943, ce dernier lui apprend qu'il ne dépend plus de Combat et qu'il a fondé son propre mouvement. Quelques mois plus tôt, en janvier 1943, Lecompte-Boinet avait établi un contact avec Londres par l'intermédiaire du colonel Manhès. Celui-ci l'avait alors mis en relation avec Jean Ayral, chef du BOA. Il avait également suggérer à Lecompte-Boinet de changer le nom d'Organisation nationale de la Résistance en Ceux de la Résistance qu'il jugeait moins ambigüe et ambitieux.
A la suite de la mission Arquebuse-Brumaire, Brossolette explique à Lecompte-Boinet que, pour être considéré comme un mouvement, son groupe doit avoir un service civil, ce qui n'est pas alors  le cas. De Vogüé, sur demande de Lecompte-Boinet et après acceptation de Frenay, prend en charge la création de ce service.

Le mouvement ne s'occupa jamais de propagande et le recrutement se fit uniquement par relations individuelles. CDLR ne publia pas de journal, se contentant d'un bulletin intérieur qui parut du printemps 1943 au mois d'août 1944.
Le contact est établi avec le BCRA de Londres. CDLR organise un service d'opérations aériennes, un service de faux-papiers, un service d'action ouvrière (destiné à développer l'esprit de résistance dans les usines) et une section d'études reliée au Comité général d'études. Lecompte-Boinet crée également un service de renseignement qui prend le nom de Manipule et qu'il confie à Jean Roquigny et Robert Reyl.
Le 27 mai 1943, Lecompte-Boinet représente CDLR à la première réunion du Conseil national de la Résistance.

Au printemps 1943, de Vogüé prend contact avec le mouvement Résistance pour envisager un travail en commun. Cette tentative se solde par un échec. En mai 1943, après des conversations avec des dirigeants d'autres mouvements, en particulier ceux de l'OCM, de Vogüé propose de créer une organisation de résistance unique pour la Région parisienne. Il rédige une note complète, passant en revue toute l'activité de la Résistance dans la Région parisienne, tant militaire qu'administrative et politique. Il propose que tous les mouvements fusionnent leurs organisations de la Région parisienne pour n'en former qu'une seule. Ce projet d'unification n'est finalement pas réalisé.
C'est à peu près à cette période que de Vogüé est chargé d'organiser le NAP sur le plan national. Il est aidé en cela par Jean-Guy Bernard, secrétaire général de Combat, qui vient s'installer à Paris, puis par Claude Bourdet qui avait été, à Combat, l'instigateur du NAP.

Au printemps et à l'été 1943, l'état-major de CDLR prend de l'ampleur avec l'arrivée de nouvelles recrues : Henri Bourdeau de Fontenay à qui Pierre Arrighi confie le service maquis, Michel Debré, Paul Arrighi qui devait remplacer Lecompte-Boinet à la tête du mouvement en cas de départ ou de disparition et Roger Cocteau, adjoint de Bourdeau de Fontenay au service maquis. Toujours dans le but d'étendre l'action de la Résistance et d'y entraîner les masses populaires, de Vogüé ("Madelin") entre en contact en juin 1943 avec l'Union des syndicats de la Seine. Au cours de ces conversations, de Vogüé et Tollet ont l'idée de constituer un Comité parisien de la Résistance, faisant appel à toutes les organisations et à tous les partis décidés à mobiliser leurs forces pour chasser l'ennemi. Ce projet n'est cependant pas mis à exécution immédiatement. Repris en septembre, il donna naissance au Comité parisien de libération.

Après le départ de Lecompte-Boinet pour Londres en septembre 1943, le mouvement est pris en main par Paul Arrighi, secondé par son fils Pierre pour les affaires militaires et par Jean de Vogüé pour les affaires civiles. Mais le 30 octobre, Paul Arrighi est arrêté. Son fils Pierre prend alors la direction du mouvement mais il est appréhendé à son tour le 19 novembre à la suite de la trahison d'un de ses agents de liaison. Jean de Vogüé, resté seul, prend comme adjoint Gilbert Grandval et Roger Cocteau pour les affaires militaires et Léo Hamon, qui vient de rejoindre le mouvement, pour les affaires civiles. L'intérim de de Vogüé prend fin avec le retour à Paris de Lecompte-Boinet au début de février 1944.

Au début de l'année 1944, sous la pression de de Vogüé, le comité central de la Résistance admet l'idée de l'union des forces militaires de tous les mouvements, sous le nom de FFI. Au mois de mai 1944, Jean de Vogue est désigné pou siéger au sein du COMIDAC, devenu ensuite le COMAC. Pour la Région parisienne, de Vogüe s'adjoint Massiet, dit "Dufresne", qui sera chargé du recrutement, et de l'organisation des forces militaires de CDLR dans la Seine. Massiet prend ensuite la fonction de chef d'état-major du colonel Lizé, chef des FFI de la Seine. Cocteau, dit "Gallois", représente quant à lui CDLR à l'état-major FFI de l'Ile-de-France, dont il est sous-chef d'état-major.
De Vogüé jette également les bases d'une organisation parisienne dont s'occupent Henri Bourdeau de Fontenay, Pierre Stibbe et Léo Hamon. La rôle de Stibbe est de recruter des adhérents et de trouver des représentants valables de CDLR dans les comités locaux de libération.

A partir du Débarquement, la lutte s'intensifie. Les groupes-francs de CDLR prennent une part active à la plupart des combats de la libération de Paris. Le groupe franc Victoire, commandé par le lieutenant de Sars, dit "Barrat" a, pendant quatre jours, défendu L'Ile de la Cité contre les attaques allemandes, particulièrement au carrefour St Michel-St Germain. En banlieue, les groupes CDLR de Saint-Germain et Poissy, sous le commandement du lieutenant Beurotte, chassent l'ennemi de la rive nord de la Seine et empêchent toute contre-attaque dans la semaine qui suit l'insurrection. Dans la nuit du 19 au 20 août, Lecompte-Boinet, désigné par le CFLN comme secrétaire général des Voies et Communications (ministre intérimaire des Travaux publics) prend possession avec une équipe restreinte du ministère. C'est également une équipe de CDLR, dirigée et entraînée par Léon Hamon, vice président du CPL, qui, le dimanche 20 août, prend possession de l'Hôtel de Ville. Cette équipe va assurer tout le fonctionnement des services municipaux et la défense de l'Hôtel de Ville, avec le capitaine Roger Stéphane, jusqu'à la Libération. Cocteau-"Gallois", quant à lui, effectue une mission historique lorsqu'il rejoint le 21 août le commandement américain et obtient la décision du commandant en chef d'envoyer le général Leclerc sur Paris.


Auteur : Fabrice Bourrée

Sources et bibliographie : 
Service historique de la Défense, dossier d'homologation du mouvement CDLR et dossiers individuels de Jean de Vogüe, Henri Bourdeau de Fontenay, Paul Arrighi, Pierre Arrighi et Roger Cocteau. 
Archives nationales, 397 AP 6 (fonds Marie Granet), 72 AJ 42 (CDLR). 
Archives du Musée de l'Ordre de la Libération. 
ONAC de Paris et de Versailles, dossiers de CVR de responsables et d'agents de CDLR.
Marie Granet, 
Ceux de la Résistance, Paris, Editions de Minuit, 1964.