Roger Coquoin
Légende :
Roger Coquoin, alias "Lenormand", premier représentant du réseau Ceux de la Libération (CDLL) au Conseil national de la Résistance
Roger Coquoin, alias “Lenormand”, the first representative of the Ceux de la Libération network (CDLL) in the National Council of the Resistance
Genre : Image
Type : Photographie
Source : © Musée de l’Ordre de la Libération Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique en noir et blanc.
Lieu : France - Ile-de-France
Contexte historique
Roger Coquoin est né le 14 mars 1897 à Gagny (Seine-et-Oise). Il est le petit-neveu d'Urbain Le Verrier (1811-1877), grand astronome, et le fils d'un grand chimiste. En 1914, alors qu'il n'a que 17 ans et qu'il sort du lycée, il s'engage dans l'armée. Il se distingue à Verdun et sur la Somme et se fait gazer en 1918. Il termine la guerre comme sous-lieutenant.
Retournant à la vie civile, il entreprend des études de pharmacie et obtient sa licence en physique et en chimie. Interne à l'hôpital Laënnec, il est ensuite choisi par le professeur Carnot pour être son chef de laboratoire à l'Hôtel-Dieu. Lauréat de la Faculté et de l'Internat, il est l'assistant de chimie du Professeur Blanchelière à l'Académie de Médecine. En 1929, il devient chef du laboratoire de chimie de cette même Académie.
Mobilisé en 1939, il est nommé capitaine de la 13e batterie du 237e Régiment d'artillerie lourde divisionnaire. Divers témoignages soulignent sa popularité auprès de ses hommes. Il est grièvement blessé dans la Somme, le 5 juin 1940. Hospitalisé près de Paris, il échappe aux Allemands en gagnant le Midi. Démobilisé le 1er août 1940, il reprend ses fonctions à la tête de son laboratoire. Choqué par la défaite française qu'il refuse, il s'efforce de réagir en groupant autour de lui certains de ses anciens soldats. Avec un ami de 25 ans, le pharmacien Chabrol, de surcroît ancien camarade de régiment, il aurait commencé à organiser des groupes de résistants en Bourgogne, dans l'Aube ou encore dans l'Eure. En janvier 1941, Coquoin a eu l'occasion de rencontrer Honoré d'Estienne d'Orves et de participer, temporairement, à l'organisation de noyaux clandestins chargés de la transmission, à Londres, d'informations sur l'armée d'occupation. C'est au début de l'année 1942 que Roger Coquoin fait la connaissance de Maurice Ripoche. Ces deux hommes se complètent à merveille : Ripoche est bouillant, plein d'allant ; Coquoin est calme et froid. Il devient "François Lenormand" : parcourant la province, il contribue à l'extension du mouvement Ceux de la Libération (CDLL) en Normandie, en Champagne, en Bourgogne, en Vendée, et même en zone Sud. Son lieu de travail joue un rôle central : chaque semaine, au laboratoire de chimie de l'Académie de Médecine, Ripoche et Médéric viennent l'y retrouver. Sa spécialité professionnelle lui permet aussi de mettre au point, avec Maurice Ripoche et Raymond Jovignot, des détonateurs et des pastilles abrasives (du carborandum englobé dans de la paraffine) : ces dernières sont destinées à saboter les moteurs des camions allemands.
Lorsque Ripoche est arrêté en mars 1943, Coquoin prendre sa suite à la tête de CDLL. Une tentative de faire évader Ripoche, qu'il conduit avec Médéric, Pergaud, Vic Dupont et le Professeur Richet, échoue.
A la direction du mouvement, sa tâche est très lourde. Il dirige des agents dont le rôle est de signaler les centres vitaux de l'ennemi. Il centralise les enquêtes et transmet leurs résultats. Lors d'une mission de Pierre Brossolette, il insiste avec le colonel Schimpf sur la nécessité d'avoir des armes.
La stature de Coquoin dépasse le seul cadre de Ceux De La Libération. Partisan acharné de l'unité d'action dans la Résistance, il se trouve en accord complet avec Jean Moulin avec qui il est en contact. Au sein du Conseil national de la Résistance (CNR), il représente CDLL dès la première réunion du 27 mai 1943, rue du Four (VIe arrondissement). A partir de juin 1943, il intègre aux groupes de corps-francs déjà constitués dans CDLL ceux du mouvement Vengeance. Lorsque l'Armée secrète est créée en zone Nord, il reçoit le commandement de la région P (Paris et neuf départements). Dans sa tâche, il travaille aux côtés d'André Boulloche, délégué militaire de la région P. Poursuivant son activité professionnelle, il n'entre dans son laboratoire qu'après un signe d'un collègue. Les réunions se multiplient. Certaines ont lieu chez Pasteur Vallery-Radot : d'après plusieurs témoignages, Coquoin aurait ainsi participé à la création du Service de santé de la Résistance, placé sous la direction de Pasteur Vallery-Radot.
L'étau se resserre autour de Roger Coquoin. La Gestapo perquisitionne à son laboratoire, chez ses relations. Il doit abandonner son domicile et se réfugie chez Madame Regnault. L'un de ses bras droits, Benezech, dit "Benoît", est employé à la Préfecture de Police. C'est au domicile de ce dernier, rue des Frères Perier, qu'il a rendez-vous, à 9 heures 30, ce 29 décembre 1943 : il tombe alors dans une souricière tendue par la Gestapo. Alors qu'il tente de s'évader, pressentant le drame, il est abattu de deux balles. D'après certains témoignages, il serait mort à la Pitié Salpétrière. Benezech, quant à lui, devait être déporté : il ne revint pas.
Ne se fiant qu'à lui-même, Roger Coquoin n'avait pas vraiment préparé sa succession. Sa disparition laisse un grand vide au sein de CDLL, dont la direction incombe au colonel Ginas.
Décorations :
Chevalier de la Légion d'honneur, Compagnon de la Libération, Croix de guerre 1914-1918, Croix de guerre 1939-1945, Médaille de la Résistance.
Roger Coquoin was born March 14th 1897 in Gagny (Seine-et-Oise). He was the grand-nephew of Urbain Le Verrier (1811-1877), a talented astronomer, and the son of a well-known chemist. In 1914, when he was only 17 years old and just out of high school, he joined the army. He distinguished himself at the Battles of Verdun and the Somme and was gassed in 1918. The end of the war found him as a second lieutenant.
Returning to civilian life, he took up pharmacy and chemistry studies and obtained his degree in physics and chemistry. Interning at l’hôpital Laënnec, he was soon chosen by Professor Carnot to be in charge of his laboratory at the Hôtel-Dieu. Graduate of the Faculté and the Internat, he was chemistry Professor Blanchelière’s assistant at the Académie de Médecine. In 1929, he became head of the chemistry laboratory there.
Mobilized in 1939, he was named Captain of the 13th Battery for the 237th Regiment of the Heavy Artillery Division. Diverse testimonies attest to his popularity with his men. He was gravely injured during the Battle of the Somme on June 5th 1940. Hospitalized close to Paris, he escaped the Germans by fleeing south. Demobilized on August 1st 1940, he recommenced his duties as the head of his lab. Shocked by the French defeat, which he refused to acknowledge, he reacted by gathering around him some of his veteran soldiers. With a friend of 25 years, the pharmacist Chabrol, also a former soldier of the regiment, he had started to organize groups of resisters in Bourgogne, in Aube and in Eure. In January 1941, Coquoin had the opportunity to meet Honoré d’Estienne d’Orves and to briefly participate in the organization of the pockets of underground movements responsible for communication with London about the occupational army. It was at the beginning of 1942 that Roger Coquoin made the acquaintance of Maurice Ripoche. These two men complimented each other: Ripoche was quick-tempered and driven; Coquoin was calm and aloof. He became “François Lenormard”: traveling the province, he facilitated the extension of the Ceux de la Liberation movement (CDLL) in Normandy, Champagne, Bourgogne, Vendée and even in the South Zone. His workplace played a central role too: each week, in the chemistry lab at the Académie de Médecine, Ripoche and Médéric would come to find him. His profession also gave me the means to develop, with Maurice Ripoche and Raymond Jovignot, detonators and abrasive pellets (made of carborandum encapsulated in paraffin): the last of which were used to sabotage German truck engines.
When Ripoche was arrested in March 1943, Coquoin replaced him as head of the CDLL. An attempt to rescue Ripoche, conducted with Médéric, Pergaud, Vic Dupont and Professor Richet, failed.
As the director of the movement, his task was very difficult. He managed the agents in charge of alerting vital centers of the enemy’s movements. He centralized their investigations and transmitted their results. On one of Pierre Brossolette’s missions, he and Colonel Schimpf insisted on the necessity of weapons.
Coquoin’s importance surpassed the work he did for the Ceux de la Libération. A fierce supporter of united action for the Resistance, he found himself in complete agreement with Jean Moulin, with whom he was in contact. At the center of the Conseil national de la Résistance (National Council of the Resistance, CNR), he represented the CDLL from its first meeting on May 27th 1943 on rue du Four (VI arrondissement). From June 1943, he incorporated the corps-francs already established with the CDLL with those of the Vengeance movement. When the l’Armée secrète (Secret Army) was created in the North Zone, he received the command of the Paris region (Paris and nine departments). In this role, he worked beside André Boulloche, military delegate for the Paris region. Continuing to pursue his profession activities, he entered the lab after a sign from a colleague. He multiplied their meetings: some were held at the home of Pastor Vallery-Radot: according to multiple testimonies, Coquoin had thusly participated in the creation of the Service de santé de la Résistance (Health Services of the Resistance), placed under the direction of Pastor Vallery-Radot.
The noose tightened around Roger Coquoin. The Gestapo raided his lab and his friend’s homes. He had to abandon his house and take refuge with Madame Regnault. One of his right hands, Benezech, called “Benoît,” was employed at the Police Headquarters. It was at the home of the latter, on rue des Frères Perier, that he had an appointment at 9:30am, on December 29th 1943: he fell into the trap laid out by the Gestapo. While trying to escape, having sensed the danger, he was shot twice. According to some accounts, he died at the Pitié Salpétrière. Benezech, meanwhile, was deported: he never returned.
Trusting only himself, Roger Coquoin had not prepared his succession, leaving a dire void in the CDLL, which was taken leadership of by Colonel Ginas.
Emmanuel Debono, "Roger Coquoin", in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.
Traduction : Gabrielle Ciceri