Raoul Nordling

Légende :

Raoul Nordling, consul général de Suède à Paris

Genre : Image

Type : Portrait

Source :

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Lieu : France - Ile-de-France - Paris

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Contexte historique

Né le à Paris le 11 novembre 1882, d'une mère française et d'un père suédois, industriel et consul général de Suède à Paris. Il fit ses études au lycée Janson-de-Sailly. Après l'obtention de son baccalauréat il partit effectuer son service militaire en Suède. De retour à Paris il travailla naturellement dans la Société des pâtes à papier Gustav Nordling créée par son père en 1892, il en devint par la suite le directeur. En 1905 au moment où la Norvège déclara la fin de l'Union avec la Suède afin de recouvrir son indépendance il fut nommé vice-consul de Suède. Tout au long de la Grande guerre, le consulat de Suède, pays neutre, fut sollicité  pour intervenir en faveur de prisonniers ou de personnes disparues (demandes de renseignements envois de colis etc.). Pour Raoul Nordling, devenu consul en 1917, ce fut aussi un moyen de contrebalancer l'image germanophile de la Suède et d'agir en faveur des relations commerciales entre Paris et Stockholm. En 1926, Raoul Nordling remplaça son père décédé comme consul général. Par ailleurs en continuant à s'occuper de l'entreprise familiale dont les affaires prospéraient, il devint également président des conseils d'administration des sociétés SKF (roulement à bille) et Alfa-Laval (matériel de laiterie). Il était alors une des principales figures de la petite mais active communauté suédoise de Paris. Ses différentes activités lui permirent d'établir bon nombre de contacts et de se constituer un précieux carnet d'adresse, qu'il sut utiliser au mieux au cours du second conflit mondial.

En septembre 1939, le consulat, dut comme en 1914, répondre aux diverses demandes de protection, en particulier celles des Suédois de Paris qui souhaitaient mettre leur famille à l'abri. Alors qu'en France s'installait la drôle de guerre, l'attaque de la Finlande par l'URSS le 30 novembre 1939 mit la Scandinavie au cœur du conflit. Par ailleurs, le minerai de fer suédois constituait également un enjeu entre l'Allemagne nazie, la France et le Royaume Uni. Raoul Nordling intervint à plusieurs reprises pour expliquer le point de vue suédois et la volonté de son pays de rester neutre. Fin avril 1940, il se rendit au nord de la Norvège quand s'y trouvait le corps expéditionnaire franco-britannique. De retour en France il dut évacuer le consulat devant l'avance allemande. Ayant assisté à l'exode et à la défaite il réintégra les locaux du consulat dans Paris occupé au début de l'été.

Au cours de l'Occupation il continua ses activités industrielles et commerciales, tout en poursuivant ses tâches consulaires de protection des intérêts suédois dont l'Allemagne était le principal partenaire commercial. De l'automne 1942 au début 1944, Raoul Nordling se trouva mêlé dans d'étranges pourparlers de paix impliquant le pape Pie XII, puis le roi de Suède Gustave VI en faveur d'une paix séparée entre l'Allemagne, le Royaume Uni et les Etats Unis. Ces tentatives, auxquelles Raoul Nordling lui même ne semblait guère croire, n'aboutirent bien évidemment pas, mais elles  furent une nouvelle occasion d'établir des liens utiles.

Après la percée d'Avranches le 30 juillet 1944, Raoul Nordling considéra qu'il pouvait désormais intervenir efficacement en faveur des prisonniers politiques. Le déroulement des événements, sa position d'intermédiaire firent de lui un personnage de premier plan au cours de la libération de Paris. Néanmoins la question des prisonniers politiques fut très probablement celle qui lui tint le plus à cœur et qu'il revendiqua totalement par la suite. Il donna alors de sa personne en multipliant les déplacements, il connaissait les rouages de l'administration allemande et utilisait auprès de ses interlocuteurs un argument qui s'avéra efficace : toute attitude humaine aujourd'hui passerait à leur actif une fois la guerre finie. Il obtint ainsi de Pierre Laval et Otto Abetz un premier accord portant sur près de mille prisonniers politiques. Après leur départ, il parvint à arracher à von Choltitz, le nouveau commandant du GrossParis, la signature d'une convention plaçant tous les prisonniers politiques sous la protection conjointe du consulat de Suède et de la Croix rouge. 3.200 d'entre eux furent ainsi sauvés. Mais, malgré ses déplacements sur place, il ne parvint pas à empêcher le départ de deux convois l'un de Pantin le 15 août (2.400 déportés), l'autre de Compiègne le 17 août 1944 (1.600 déportés).

En contact avec le commandement allemand, il l'était également avec la Résistance. Le 16 août 1944 il eut une entrevue avec le délégué du GPRF pour la France occupée, Alexandre Parodi. Quand le 19 août 1944 l'insurrection éclata avec la prise de contrôle de la Préfecture de Police, c'est assez naturellement que Raoul Nordling se trouva dans la position d'intermédiaire entre les deux camps. Quand la menace d'un assaut de la préfecture par les Allemands se précisa, il obtint un cessez-le-feu rapidement prolongé en trêve. De fait, il parvint à faire admettre à von Choltitz que la Résistance était bien un interlocuteur. Ainsi, lorsque le dimanche 20 août, Parodi, Roland Pré et Emile Laffon furent arrêtés lors d'un contrôle par les Allemands,  Nordling intervint auprès de von Choltitz et obtint leur libération.

Alors que la trêve, désavouée dès le début par le commandement militaire de l'insurrection, n'était pas respectée, le consul de Suède poursuivit ses contacts auprès du commandant allemand. À chaque rencontre il répétait inlassablement que toute mesure qui épargnerait Paris et sa population serait ultérieurement mise à son actif. Pendant que Nordling continuait d'intervenir en faveur des prisonniers ou encore afin de favoriser le ravitaillement des Parisiens, les événements se précipitèrent. Alité à la suite d'un malaise cardiaque, il fut remplacé par son frère Rolf dans une mission destinée à presser l'armée américaine de marcher sur Paris. La délégation quitta Paris le 22 août. Quand elle parvint à rencontrer le général Bradley le 24, une autre mission, celle de Cocteau Gallois était déjà intervenue et des éléments avancés de la 2e DB approchaient les portes de la capitale, le détachement du capitaine Dronne parvenant même jusqu'à l'hôtel de ville.

Avec l'arrivée des troupes françaises et américaines s'achevait la libération de Paris . Remis de son malaise, Raoul Nordling fit à nouveau l'intermédiaire et transmit à von Choltitz l'ultimatum exigeant la capitulation de la place de Paris. Après quelques combats aux abords de l'hôtel Meurice, le commandant allemand capitula. Nordling prit sous sa protection les auxiliaires féminines de la Wehrmacht, plus connues sous le sobriquet de "souris grises" et intervint encore pour faciliter la reddition de tel ou tel poste allemand.

Une fois la libération effective, il retourna à ses activités industrielles et consulaires. Parfois critiqué pour avoir favorisé la trêve, comme pour ses relations d'affaire avec l'occupant, il présenta une première fois "son livre de bord de la libération de Paris" en juin 1945 lors d'une réunion d'anciens combattants. C'est à ce moment qu'il commença en collaboration avec Victor Vinde, journaliste suédois résidant à Paris, l'écriture de ses mémoires. Néanmoins, le livre ne parut pas, oublié au fond d'un coffre de la société Nordling. Ce n'est que 40 ans après sa mort que ses mémoires furent publiées.

Raoul Nordling est décédé à Neuilly-sur-Seine le 1er octobre 1962.


Fabrice Virgili in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004