L'insurrection (19 - 24 août 1944)

Au sein du CPL, Tollet est favorable à l’appel aux armes. À la Délégation générale, Alexandre Parodi et Jacques Chaban-Delmas sont très réticents à déclencher l’insurrection parce qu’ils redoutent les destructions et veulent éviter l’hécatombe. De retour de Londres le 16 août, Chaban est porteur des ordres du général Koenig de ne pas déclencher prématurément l’insurrection. Mais la situation est tout autre en région parisienne où la montée vers un grand soulèvement est irréversible. Le 10 août, les FTP ont lancé un appel “Tous au combat ! En avant pour l’insurrection nationale !”. Dans l’après-midi du 18 août, la CGT et la CFTC appellent tous les travailleurs à la grève. Consulté, le CNR décide, sur la proposition de Georges Bidault, de soutenir ces initiatives. Le soir, les commandants de la Garde républicaine et de la Gendarmerie de la Seine se placent sous les ordres de la Délégation générale. Dans la soirée, le colonel Rol-Tanguy décrète la mobilisation générale en exécution des consignes du CNR et en accord avec les décisions du CPL. Par une affiche apposée sur les murs, ordre est donné à tous les Parisiens de rejoindre les FFI.

L’initiative vient de la police : le commandement allemand a donné l’ordre aux policiers de reprendre leur service. Prévenus dans la nuit, 2 000 policiers insurgés occupent la Préfecture de Police au matin du 19 août. Bussière, le Préfet de police est arrêté. Rol-Tanguy se rend sur les lieux pour soutenir les insurgés et leur prescrire le port du brassard FFI. L’ordre général d’insurrection nationale, lancé quelques heures avant, rappelle à chacun sa mission : patrouilles dans Paris, occupation des bâtiments publics, usines, gares…enfin “ouvrir la voie de Paris aux armées alliées victorieuses et les y accueillir”. Les policiers accueillent Charles Luizet et hissent les couleurs.

Dès l’après-midi, le poste de commandement du chef des FFI d’Île-de-France est transféré du 66 rue de Meaux (19e arrondissement) au 9 rue Schoelcher (14e arrondissement), dans les souterrains d’un immeuble du Service de l’Assainissement, relié avec les différents postes d’égouts de la capitale par un réseau téléphonique indépendant. L’emplacement choisi tient également compte de la marche des armées alliées attendues par le sud de Paris.

Au soir du 19, une trêve est conclue verbalement pour les abords immédiats de la préfecture ; elle est étendue, dans la nuit, à tous les édifices occupés par la Résistance. Mais la trêve est peu respectée de part et d’autre.

Le dimanche 20 à l’aube, Léo Hamon, du CPL, et une poignée d’hommes de Ceux de la Résistance investissent l’Hôtel de Ville sans grande difficulté, avec l’aide de quelque 200 agents résistants. La défense est confiée à Aimé Lepercq de l’OCM, assisté de Roger Stéphane. L’après-midi, Marcel Flouret, le nouveau préfet, s’installe.  Le drapeau tricolore flotte sur l’Hôtel de Ville.

Dans la soirée du 21 août, les premières barricades sont édifiées, au carrefour Saint-Germain-Saint-Michel, dans le secteur entre la Seine et le Luxembourg qui défend l’île de la Cité. Le 22 août, Rol fait afficher un ordre pour la défense de la population parisienne, accompagné d’un appel: “Tous aux barricades!”. Le même jour, la presse, enfin libre de paraître, diffuse des instructions pour les construire. Et ce sont près de 600 barricades qui surgissent un peu partout.

Dès le 18 août, Rol-Tanguy a envoyé le commandant de Varreux (Brécy), de l’état-major régional, établir la liaison avec les Américains. Mais cette mission échoue car, près d’Étampes, sa camionnette est mitraillée par un avion américain qui la prend pour un véhicule ennemi. Le 22, Gallois, adjoint de Rol, réussit à gagner les lignes américaines. Il expose à Patton la situation dans Paris, insiste sur l’urgence d’un soutien allié à l’insurrection, puis obtient de rencontrer Leclerc qui se trouve à Laval avec le 12e groupe d’armées commandé par le général Bradley.

Le 23, la 2e DB arrive à Rambouillet. Elle est alors organisée en groupements tactiques qui combinent l’infanterie, les chars et l’artillerie. Regroupée dans la nuit, la division s’engage le 24, à partir de 7 heures, sur deux axes : le groupement Billotte chargé de l’effort principal sur la RN 20, de Longjumeau à la Porte d’Orléans et le groupement Langlade, chargé d’un itinéraire plus à l’ouest, qui évite Versailles par la vallée de Chevreuse et vise le pont de Sèvres. La progression de la 2e DB est marquée par de sévères combats à hauteur de Longjumeau, puis de Massy, de la vallée de la Bièvre, de la Croix-de-Berny et de Fresnes. Leclerc rejoint Arpajon dans la matinée. À la tombée de la nuit, les éléments les plus avancés de la 2e DB, sont à Bourg-la-Reine sur l’axe principal (groupement Billotte) et au pont de Sèvres sur l’axe secondaire (groupement Langlade). Cette situation ne satisfait pas Leclerc qui espérait être dans Paris le soir même.

Source(s):

Christine Levisse-Touzé et Vladimir Trouplin, Paris, Compagnon de la Libération, Comité d’histoire de la Ville de Paris, 2010.

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L'organisation militaire de la Résistance en Ile-de-France haut ▲

Le général Jacques Chaban-Delmas, délégué militaire national, est le responsable militaire du Gouvernement provisoire (GPRF), placé sous l’autorité du général Koenig, commandant en chef des FFI resté à Londres pour coordonner les opérations avec celles des Alliés. Il est chargé de subordonner toute l’action militaire de la Résistance au général Koenig. Le Comité d’action militaire (COMAC), organisme de direction de commandement des FFI rattaché au CNR depuis mai, est composé de trois membres : Pierre Villon (Front national), Maurice Kriegel 'Valrimont' (MUR), et le commandant Jean de Vogüe "Vaillant" (mouvements de zone Nord). Au niveau national, le chef d'état-major FFI est Alfred Malleret-Joinville.

Lors de la création des Forces françaises de l’Intérieur (FFI) le 1er février 1944, résultant de la fusion théorique de l’Armée secrète, des Francs-Tireurs et partisans et de l’Organisation de Résistance de l’armée, la France a été divisée en 12 régions militaires et des chefs militaires et régionaux ont été désignés. L’intensification de la répression allemande et de celle du gouvernement de Vichy avec l’installation de la milice en zone Nord, décime les rangs de l’état-major FFI en Ile-de-France. Dejussieu-Poncarral est arrêté en mai puis le commandant Lefaucheux début juin. Le 5 juin, le colonel Henri Tanguy, "Rol", lui succède à la tête des FFI de la région parisienne. Il dispose d’un adjoint pour le département de la Seine, le colonel de Marguerittes, alias « Lizé », officier de carrière, résistant de l’Organisation civile militaire. 

La mise en place des structures départementales FFI de P1, qui s'étale sur plusieurs semaines, est loin d'être simple. La représentation des mouvements constitue l'un des problèmes les plus difficiles. Le chef régional donne son accord final aux désignations mais elles reviennent initialement aux mouvements et le cas échéant les Délégués militaires interviennent aussi. Fin juillet, chefs et états-majors départementaux sont pour l'essentiel en place dans la Seine (colonel de Marguerittes - "Lizé", OCM), en Seine-et-Oise Nord (Philippe Viannay - "Philippe" - de Défense de la France) et en Seine-et-Oise Sud (Pélissier - "Forestier, Duroc" - de Libération Nord, qui sera remplacé par Jacques Pastor - Front national - le 15 août). En Seine-et-Marne, les chefs départementaux des FFI sont successivement Jacques Desbois jusqu'à son arrestation le 24 juillet 1944, puis Hubert Desouches.

Auteur(s) : Fabrice Bourrée
Source(s) :

Roger Bourderon, "L'état-major régional FFI de la région parisienne de sa création à la percée d'Avranches" in Le Patriote Résistant, mai 2009.
Christine Levis

La prise de la Préfecture de Police (19 août 1944) haut ▲

Dans la matinée du 19 août, les membres du Conseil national de la Résistance (CNR) et ceux du Comité parisien de Libération (CPL) se réunissent séparément dans les locaux du ministère de l'Éducation nationale situés rue de Bellechasse. Après débats et discussions séparés, vers 11 heures du matin, les deux organismes décident conjointement de lancer chacun un "appel à l'insurrection" qui est placardé dans Paris.

Depuis le 10 août, les cheminots, puis les policiers le 15, sont entrés en grève. Impatience, fébrilité ou concurrence des diverses composantes de la Résistance, précipitation ou série de contretemps, difficultés des liaisons, certainement tout cela mêlé, des groupes ont déjà devancé cet appel, prenant possession de diverses mairies parisiennes dès le 18 août. Il en est de même pour la première occupation symbolique de "l'insurrection", avant l'arrivée des troupes alliées encore loin de Paris, la Préfecture de Police, située sur l'île de la Cité. 

Au matin du 19 août, 2 000 policiers insurgés occupent la Préfecture de Police. Bussière, le Préfet de police est arrêté. Rol-Tanguy se rend sur les lieux pour soutenir les insurgés et leur prescrire le port du brassard FFI. Les policiers accueillent Charles Luizet et hissent les couleurs.

Auteur(s) : Cécile Vast
Source(s) :

DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Les appels à l'insurrection et à la mobilisation générale haut ▲

Entre le 20 et le 25 août, de nombreux appels destinés à mobiliser toutes les forces possibles sont lancés par les organisations résistantes, que ce soit l’état-major FFI, les FTP, le Comité parisien de Libération, les Comités départementaux de Libération…

Auteur(s) : Département AERI

La "trêve" autour de la Préfecture de Police (19-21 août 1944) haut ▲

Le 19 août 1944, Raoul Nordling, consul de Suède, négocie un accord entre les Allemands et les FFI ; il prend effet, sous la forme d'une "trêve", vers 21 heures et s'applique à l'ensemble des points d'appui occupés par les résistants. Le lendemain, le CNR se réunit ; les discussions sur l'opportunité de cette "trêve" sont très vives. Elle est vivement dénoncée par André Tollet, président du CPL, et Rol-Tanguy, commandant des FFI. Léo Hamon, membre du CPL la défend, de même que Chaban-Delmas et Parodi, la justifiant par la crainte d'un désastre, les forces allemandes étant importantes. Au sein du CNR, Pierre Villon représentant du FN, partisan de l'action immédiate, rejette l'idée d'une trêve et attaque Parodi. Cette "trêve" centrée essentiellement sur la Préfecture ne dure que quelques heures, et s'achève le 21 août.

Auteur(s) : Christine Levisse-Touzé

L'occupation de l'Hôtel de Ville (20 août 1944) haut ▲

En 1944, l'Hôtel de Ville est le siège de la Préfecture de la Seine et du conseil municipal de la Ville de Paris. L'Hôtel de Ville a valeur de symbole car il est le gardien séculaire des principes de liberté. Il a été l'âme de la Commune de Paris dans son esprit de révolte.

Après la prise de la Préfecture de Police le 19 août 1944, l'Hôtel de Ville est l'objectif des résistants. A l'aube du 20 août, Léo Hamon ("Sacy)", membre du Comité parisien de Libération et ses camarades de Ceux de la Résistance, Aimé Lepercq (commandant "Landry") membre de l'Organisation civile et militaire, tout juste libéré de la prison de Fresnes, le lieutenant Roger Stéphane, décident de s'emparer sans coup férir de l'Hôtel de Ville. Ils ont composé un détachement avec l'aide des FFI de la Préfecture de Police. Léo Hamon se fait ouvrir les portes de la maison commune. Un gardien ouvre et Léo Hamon en profite pour gagner les étages et se précipite dans les locaux du Préfet de la Seine, nommé par le gouvernement de Vichy, René Bouffet. Il prend possession des lieux au nom du gouvernement provisoire de la République française et pour le compte du Comité parisien de libération.

Il y a alors quelques 400 hommes et femmes avec une vingtaine d'armes individuelles et six fusils mitrailleurs. Roger Stéphane recommande "d'économiser les munitions car il n'y a que 5 minutes de feu". Léo Hamon établit son quartier général dans le bureau du Préfet de la Seine, actuel bureau du maire de Paris. La défense de l'Hôtel de Ville s'organise sous la direction du commandant Aimé Lepercq ("Landry"), assisté de Roger Stéphane qui dispose de 300 hommes environ constitués pour l'essentiel des Equipes nationales et des gardes mobiles. Le Comité parisien de Libération présidé par André Tollet, assure le fonctionnement de l'administration civile. Marcel Flouret, nommé par le gouvernement provisoire d'Alger, prend possession de ses fonctions de Préfet de la Seine dans l'après-midi-même : une activité où le dramatique côtoie le pittoresque habite la Maison du Peuple de Paris.

Les premières escarmouches commencent le soir du 20 août et durent trois jours et quatre nuits, au cours desquels se succèdent des accalmies et des tirs de chars allemands. Les combattants, depuis les fenêtres de l'immense bâtiment, ripostent et tirent sur des camions allemands, les immobilisent et récupèrent les armes. Les combattants, à partir du 22 août, sortent en patrouille jusqu'aux barricades les plus proches, généralement pour les corvées de ravitaillement jusqu'aux Halles.

Le 20 août, les Américains amorcent le contournement de la capitale et pénètrent en Seine-et-Marne. De Gaulle se rend auprès du général Eisenhower pour le convaincre d’envoyer la 2e DB libérer Paris.


Auteur(s) : Christine Levisse-Touzé
Source(s) :

DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Les barricades haut ▲

Dans la soirée du 21 août, les premières barricades sont édifiées, au carrefour Saint-Germain-Saint-Michel, dans le secteur entre la Seine et le Luxembourg qui défend l’île de la Cité. Le 22 août, Rol fait afficher un "ordre pour la défense de la population parisienne", accompagné d’un appel:“Tous aux barricades !”. Le même jour, la presse, enfin libre de paraître, diffuse des instructions pour les construire. Et ce sont près de 600 barricades qui surgissent un peu partout. Parisiens et Parisiennes, jeunes et moins jeunes, font la chaîne pour se passer pavés, grilles, sacs de sable…tout est bon. L’état-major FFI surveille les travaux. Rolfait même appel au secrétaire du syndicat des terrassiers. L’objectif du commandement est de réduire la circulation allemande. Les barricades n’ont pas pour effet de libérer Paris, mais elles ont un impact psychologique très grand : les Parisiens participent à leur propre libération. Paris renoue avec la tradition révolutionnaire de 1830 et 1848, dont les barricades sont le symbole.

Tout comme la capitale, la banlieue s’insurge et de nombreuses barricades sont construites dans différentes communes, essentiellement dans la proche banlieue.

Auteur(s) : Christine Levisse-Touzé
Source(s) :

DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

L'insurrection dans le quartier Saint-Michel - Ile de la Cité haut ▲

Du 19 au 25 août 1944, la place Saint-Michel fut le théâtre de nombreux combats. Située au centre de Paris sur le quai rive gauche de la Seine, elle est le point de passage obligé pour les troupes allemandes qui se dirigent vers l'est ou le nord de la capitale. En face d'elle juste de l'autre côté du fleuve dans l'Ile de la Cité, s'élève la préfecture de police, devenue le symbole de l'insurrection depuis que la police parisienne l'a investie aux premières heures du samedi 19 août. Les FFI qui ont transformé la place en camp retranché ont pour mission de protéger la préfecture des attaques de la garnison du Sénat venant du sud et d'intercepter les véhicules allemands qui traversent Paris d'ouest en est.

Entre eux et les chars du Sénat, le "carrefour de la mort" à l'angle des boulevards Saint-Michel et Saint-Germain, un obstacle sur lequel viendront s'échouer de nombreuses tentatives d'incursion ennemies. Ces FFI seront baptisés "maquis de Saint-Séverin", du nom de la petite église du quartier latin, toute proche. Parmi leurs chefs, le capitaine Lacroix, le sous-lieutenant Vallade, le lieutenant Castellan, le lieutenant Joubert, l'inspecteur principal Bidault, le lieutenant Sarran… ou encore Jean Pronteau, chef du groupe franc "Cévennes". Le PC est installé place du Panthéon dans les locaux du commissariat. Les hommes appartiennent aux groupes francs "Victoire" et "Barat de Sars" du mouvement Ceux de la Résistance, au Front national, au Mouvement de libération nationale, à l'Organisation civile et militaire du secteur sud. Mais on trouve aussi des forces de police aux ordres de Boucher du NAP (Noyautage des administrations publiques), dont les 90 gardiens du commissariat d'Ivry sur Seine commandés par l'inspecteur Maurice Longue par exemple, des membres des Milices patriotiques dépendant de l'état-major FFI du colonel Rol-Tanguy.

Auteur(s) : Gilles Primout

L'insurrection dans le secteur des Batignolles haut ▲

Le 19 août 1944, à 6h, les FFI prennent possession de la mairie des Batignolles. Une heure plus tard, la drapeau tricolore flotte sur l’hôtel de ville. En début d’après-midi, les FFI attaquent la garage de la rue Boursault utilisé comme entrepôt de vivres par les Allemands. La contre-attaque d’une auto-mitrailleuse les oblige à faire demi-tour. Le garage est finalement pris le lendemain. Dans l’après-midi, des coups de main sur des garages ou des locaux occupés procurent des armes aux FFI qui font également de nombreux prisonniers. Le 20 août, les Allemands assiègent la mairie durant deux heures et finit par se replier laissant un tank en panne sur place. Le lendemain, un groupe FFI part pour Saint-Ouen en vue de la capture d'un tank en état de marche, qui se trouverait aux usines SOMUA. Après escarmouche, le tank est ramené. Le mardi 22 août est marqué par de nombreuses scènes de guerilla essentiellement dans l’axe du boulevard des Batignolles. Des barricades bloquent les principales artères du secteur. Le 25 août, la division Leclerc est dans Paris. Aux Batignolles, la batille diminue d’intensité. Les FFI procèdent au nettoyage du secteur et arrêtent miliciens et collaborateurs.

La presse clandestine paraît au grand jour haut ▲

À la fin de l'année 1943 est fondée la Fédération nationale de la Presse clandestine (FNPC), dont le "bureau permanent" présidé par Albert Bayet est chargé de préparer la sortie des journaux au moment de la libération du territoire et d'organiser ensuite la presse libre. En étroite liaison avec la Commission de l'Information du CNR présidée par Pierre Hervé, ainsi qu'avec le Comité parisien de la Libération, une liste de journaux clandestins destinés à paraître au grand jour est établie. Elle désigne des journaux "autorisés à paraître à Paris, en raison de leur activité dans la clandestinité ou de leur attitude patriotique à l'égard de l'ennemi". L'Humanité, L'Aube, Le Populaire et Ce soir sont les journaux d'avant-guerre autorisés à reparaître. Ceux issus de la presse clandestine sont : Combat, Franc-Tireur, Défense de la France, Libération, France libre, Front national et le Parisien libéré.

La presse collaborationniste cesse de paraître le 18 août. Le même jour, les journaux collaborationnistes, La Gerbe rue des Pyramides, Je suis partout, rue de Rivoli, L’Intransigeant, rue Réaumur sont occupés. Le 20, les rédacteurs des journaux de la Résistance occupent leurs locaux. Ce Soir, Le Front national pour la lutte, la libération et l'indépendance de la France, Libération se partagent l’immeuble de Paris-Soir, rue du Louvre ; CombatFranc-TireurDéfense de la France, celui de L’Intransigeant ; Le Populaire et Libération s’installent dans celui du Matin, à l’angle du boulevard Poissonnière et de la rue du Faubourg-Poissonnière et L’Humanité dans celle du Petit Parisien, rue d’Enghien. Dans la soirée du 21 août, Alexandre Parodi, ministre des territoires occupés, donne l’autorisation aux journaux de la Résistance de paraître au grand jour.

Les résistants de la radio se trouvent déjà dans la place au 37, rue de l’Université. Dès 1942, Pierre Schaeffer a fondé un studio d’essai destiné à tester de nouvelles émissions et former des techniciens. Il a également rassemblé pour le jour de la libération, des disques enregistrés, chants nationaux, musique interdite. Il a été renvoyé par Philippe Henriot, ministre de l’Information du gouvernement de Vichy mais son équipe est restée. Dans la nuit du 20 au 21 août, le central de radio-diffusion, rue de Grenelle est occupé. Le poste y a été laissé en bon état. Les émissions clandestines sont diffusées. L’appel aux armes est diffusé par radio. Le 23 août dans l’après-midi, Pierre Crénesse diffuse son premier reportage en direct. Au studio d’essai de la rue de l’Université, la voix de la nation française se fait entendre par l’intermédiaire de Pierre Schaeffer dès le début de l’insurrection. Les reportages ont été diffusés en direct : le discours de Bidault à l’Hôtel de Ville, le 25 août au soir, l’entrée de la 2e DB, le défilé. La BBC n’a plus le monopole des messages. Le drapeau tricolore flotte sur l’antenne de la tour Eiffel.

Auteur(s) : Cécile Vast et Christine Levisse-Touzé
Source(s) :

Sources : DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004 et Paris insurgé, Paris libéré

Incendie du Grand Palais (23 août 1944) haut ▲

Ce 23 août, alors que la 2e DB s’ébranle vers Paris, la 5e division du XXe Corps US (général Irwin) libère Nemours et Fontainebleau. A Paris, von Choltitz reçoit l’ordre d’Hitler d’opérer le maximum de destructions. Il menace les résistants d’attaquer les édifices publics. Pour déloger un groupe de policiers résistants cernés dans le Grand Palais, les Allemands "téléguident" sur le monument un engin à chenilles bourré d'explosifs. L'explosion est énorme.

Auteur(s) : Christine Levisse-Touzé
Source(s) :

DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Missions de liaisons auprès des Alliés haut ▲

Dès le 18 août, Rol-Tanguy a envoyé le commandant de Varreux (Brécy), de l’état-major régional, établir la liaison avec les Américains. Mais cette mission échoue car, près d’Étampes, sa camionnette est mitraillée par un avion américain qui la prend pour un véhicule ennemi. Le 22, Gallois, adjoint de Rol, réussit, avec l’aide du docteur Monod, à gagner les lignes américaines. Il expose à Patton la situation dans Paris, insiste sur l’urgence d’un soutien allié à l’insurrection, puis obtient de rencontrer Leclerc qui se trouve à Laval avec le 12e groupe d’armées commandé par le général Bradley. Le 20 août, le général de Gaulle qui arrive d’Afrique du Nord, se rend en Normandie auprès d’Eisenhower. Celui-ci l’informe du contournement de la capitale par la 3e armée en deux colonnes ; l’une a déjà atteint Mantes, l’autre arrive à Melun. À l’ouest, le groupe d’armées du maréchal anglais Montgomery, refoule la résistance tenace des Allemands et progresse lentement vers Rouen. Mais, entre Rouen et Paris, c’est le vide. De Gaulle lui rappelle “l’importance du sort de Paris, qui intéresse d’une manière essentielle le gouvernement français […]. “Je me vois”, lui dit-il, “obligé d’intervenir et de vous inviter à y envoyer des troupes. Il va de soi que c’est la 2e division blindée française qui doit être désignée en premier lieu”.

Source(s) :

Christine Levisse-Touzé et Vladimir Trouplin, Paris, Compagnon de la Libération, Comité d’histoire de la Ville de Paris, 2010

La progression de la 2e DB vers Paris haut ▲

Le 23 août 1944, à 18h, Leclerc parvient à Rambouillet, où il établit son PC. A l'aube du 24 août 1944, la 2e Division blindée la 2e DB se met en route suivant deux axes.

• Le Groupement tactique Langlade doit prendre la route la plus directe, par l’ouest en passant par Versailles. Il essuiera des tirs vers Toussus-le-Noble et devra engager une bataille de chars dans le bois de Meudon mais arrivera au pont de Sèvres dans la soirée. Intinéraire : Rambouillet -> Chevreuse -> Toussus-le-Noble -> Villacoublay -> Clamart -> Sèvres -> Porte de Saint-Cloud.

• Le Groupement tactique Billotte doit passer par Arpajon et Longjumeau pour enfoncer les défenses allemandes installées à la Croix-de-Berny. Il devra faire face à des accrochages à Massy et Wissous et décidera de contourner la Croix-de-Berny par Fresnes, mais se heurtera à la défense acharnée des prisonniers allemands (de droit commun), libérés pour la circonstance. Quand le groupe Billotte trouve enfin le passage vers 21 heures, les troupes sont exténuées. Il est impossible de libérer Paris le soir même.
Itinéraire : Rambouillet - > Limours -> Arpajon -> Longjumeau -> Croix-de-Berny, où elle se scinde en trois groupes:
- Détachement Dio, par la Porte d'Orléans.
- Détachement Billotte, par la Porte de Gentilly.
- Détachement Dronne, par la Porte d'Italie.

Vers 19h, devant le piétinement de ses véhicules à La Croix-de-Berny, Leclerc décide d’envoyer le capitaine Dronne – qui avait inscrit « Morts aux cons » sur sa jeep – avec cent cinquante hommes et quelques véhicules blindés en éclaireur. La compagnie pénètre dans Paris par la porte d’Italie, franchit le pont d’Austerlitz, longe les quais de la Seine jusqu’à l’Hôtel de Ville, où arrive vers 22 heures. 

Auteur(s) : Fabrice Bourrée