Rebord oriental du Vercors

Légende :

Route et rail longent le rebord oriental du Vercors au niveau de la commune de Miribel-Lanchâtre.

Genre : Image

Type : Paysage

Producteur : Cliché Alain Coustaury

Source : © Collection Alain Coustaury Droits réservés

Détails techniques :

Photographie argentique couleur.

Date document : Juin 2006

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Miribel-Lanchâtre

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Analyse média

La juxtaposition de la voie ferrée Gap-Grenoble et de la route nationale 75 s'explique par l'étroitesse de la vallée de la Gresse. Un puissant relief collinaire orienté nord-est sud-ouest conduit à des voies de communications aux tracés sinueux, au percement de tunnels routiers et ferroviaires. Cet axe de communication est dominé par les hautes falaises de la retombée orientale du Vercors. On aperçoit l'impressionnant escarpement calcaire des rochers des Deux sœurs qui culminent à 2 194 mètres alors que route et voie ferrée sont à 710 mètres. Il domine la crête boisée de la Ferrière s'élevant à 1 508 mètres. Entre les deux, une dépression est empruntée par le col de l'Arzelier situé à 1 154 mètres. Cette disposition met bien en évidence une particularité du Vercors. Les falaises, limitant pratiquement les quatre faces du massif, ne dominent pas directement les plaines et vallées bordières. Entre elles se développe un ensemble collinaire, aux fortes pentes et grandes dénivellations. Ces collines ont joué un rôle notable dans l'implantation de la Résistance.


Auteurs : Alain Coustaury

Contexte historique

L'intérêt de cette photographie est double. D'une part, elle permet de définir un des aspects du massif du Vercors, d'autre part elle présente un axe de pénétration de l'US Army en août 1944 en direction de Grenoble.

En 1939, alors qu'en train, il rejoignait son affectation militaire à Mours-Saint-Eusèbe dans la Drôme, Jean Bruller a emprunté cette voie ferrée. Dans son livre La bataille du silence, il témoigne de la fascination que lui inspirait le Vercors :
« Nous reçûmes dans nos gamelles un café léger mais bouillant et, tandis que nous buvions, un murmure parcourait le couloir [du train], le Vercors, le Vercors. Je connaissais ce nom, j'en admirais la sonorité suggérant une noblesse hautaine, mais je n'avais jusqu'alors qu'imparfaitement situé ce massif puissant au contrefort des Alpes. Je gagnai le couloir, et fut surpris par l'espèce de respect, de révérence, sinon de vénération que mes camarades montagnards paraissaient porter aux sévères remparts de cette forteresse naturelle. Bientôt moi-même je partageai ces sentiments, un peu par contagion peut être ; mais aussi la grandeur indomptable qu'évoquait l'immense navire surgissant de la plaine exerçait sur moi une fascination croissante». Quand il dut choisir un pseudonyme lors de la parution en 1942 de son livre Le silence de la mer, il se souvint de la fascination causée par sa vision du Vercors et par ses randonnées dans le massif.

Après le débarquement de Provence, le 15 août 1944, l'US Army remonta la vallée du Rhône chassant devant elle l'armée allemande. Un autre axe de pénétration était la route des Alpes afin de conquérir le plus rapidement possible Grenoble. Abandonnée par l'armée allemande le 22 août 1944, la ville est libérée par l'action conjuguée des FFI et de l'US Army. Or, dans les plans des Alliés, la prise de Grenoble était prévue un mois après le débarquement. La rapidité de l'avance de l'US Army s'explique par le retrait de la Werhmacht qui voulait protéger son front italien et aussi par l'action de la Résistance tout le long des routes des Alpes, notamment sur l'axe visible sur la photo. Voie ferrée et route ont été le théâtre de sabotages ou d'accrochages. On peut citer celui du 10 juillet 1944 où des Résistants, notamment Joseph La Picirella, aidés par un OG (groupe opérationnel de l'US Army) parachuté sur le Vercors, attaquèrent un convoi allemand au niveau de Lus-la-Croix-Haute. Dans le même secteur, le 18 août, Alexis Santini reçoit l'ordre de faire sauter le viaduc de Lus-la-Croix-Haute sur la voie ferrée. Il prend contact avec le chef des Résistants cheminots de Lus-la-Croix-Haute pour étudier avec lui les points les meilleurs pour la mise en place des explosifs. En fin de matinée, trois P38 Lightning de l'USAAF, à basse altitude, bombardent le viaduc sans l'atteindre. Malheureusement un des appareils accroche la cime des arbres et explose plus loin, tuant le pilote. Le corps de Robert Taylor sera récupéré par la Résistance de Lus-la-Croix-Haute et enterré dans le cimetière du village. Le 20 août, l'avant-garde de l'US Army atteint Lus-la-Croix-Haute. Le 21, de Lassus Saint-Geniès, commandant des FFI de la Drôme, autorise les chefs de commandos Muelle et Beaumont, avec quelques compagnies FFI, à harceler les Allemands sur la route nationale 75 au nord de Lus-la-Croix-Haute. Le 21, ils prennent Pont-de-Claix et envoient un message aux Américains, toujours au col de la Croix-Haute, que la route est libre.

Cet axe de communications, moins connu que celui de la vallée du Rhône, a joué un rôle important au lendemain du débarquement de Provence.


Auteurs : Alain Coustaury
Sources : Bruller Jean (« Vercors »), La bataille du silence, Presses de la Cité, 1967.